Viols de Mazan : “Not all men”, consentement, somnophilie… les termes pour mieux comprendre ce procès hors normes

Viols de Mazan : "Not all men", consentement, somnophilie... les termes pour mieux comprendre ce procès hors normes

Le procès qui s’est ouvert le 2 septembre 2024 met au centre de l’affaire la notion de consentement. EPA – GUILLAUME HORCAJUELO

Le procès des viols de Mazan qui s'est ouvert à Avignon le 2 septembre, place au centre du débat public de nombreux termes tels que le consentement ou la soumission chimique. Focus sur certains d'entre eux afin de mieux comprendre l'affaire. 

Une cinquantaine d'hommes sont jugés à Avignon depuis le 2 septembre dans le cadre du procès des viols de Mazan. Dominique Pelicot a reconnu avoir drogué à son insu sa femme Gisèle pendant dix ans, afin d'accueillir des hommes chez eux pour la violer. Ce procès met en lumière de nombreux termes et sujets, placés au coeur de l'affaire, comme l'ont raconté nos confrères de Ouest France

Le viol 

La notion de viol est entrée dans le Code pénal en 1791 mais elle n'a été définie et véritablement punie qu'à partir de la fin des années 1970. En 1978, le débat provoqué par le procès des violeurs d'Anne Tonglet et Araceli Castellano, rendu public sur demande de Gisèle Halimi, avait participé à l'entrée en vigueur d'une nouvelle loi sur le viol en 1980. 

Depuis cette date, l'article 222-23 du Code pénal le définit comme "tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d'autrui ou sur la personne de l'auteur par violence, contrainte, menace ou surprise". 

Mais la France se dirige potentiellement vers une redéfinition du viol dans le code pénal afin d'y intégrer la notion de consentement. L'idée avancée au départ par le président Emmanuel Macron en mars 2024 a été soutenue par le ministre de la Justice Didier Migaud, qui a déclaré fin septembre y être favorable. 

La notion de consentement 

Ce terme se retrouve au coeur du procès car la victime était endormie au moment des faits. Le consentement, qui est dans ce cadre sexuel, est défini dans Le Robert comme un "acquiescement donné à un projet ; une décision de ne pas s'y opposer". 

Cette notion ne semble cependant pas faire sens pour certains des accusés, qui remettent totalement en cause cette notion dans leurs témoignages. "On me traite de violeur juste parce qu’il y a ce mot de non-consentement. Pelicot m’a manipulé et je suis tombé dans son piège" a dit Simone M. Ou bien : "Du début à la fin du rendez-vous, rien ne m'a choqué. Je pensais qu'elle faisait semblant de dormir", a déclaré Eric D.

Certains avocats des mis en cause avaient également mis en avant le fait que leurs clients pensaient participer aux jeux d'un couple libertin et ignoraient que Gisèle Pelicot n'était pas consentante. Ce à quoi elle avait répondu : "Il n'y a pas 'viol et viol'. Un viol est un viol". 

La somnophilie

Ce terme est ressorti lors des prises de parole. La somnophilie consiste à être sexuellement attiré par quelqu'un qui est inconscient ou endormi. C'est notamment quelque chose qui a été mis en avant par Jérôme V., l'un des accusés qui s'est rendu à six reprises au domicile des Pelicot. Interrogé mercredi 2 octobre, l'homme n'a pas nié son attrait pour la "somnophilie", relate franceinfo. Un autre accusé, Thierry Po., a dit avoir appris ce mot au procès avant d'avouer qu'il avait déjà commis les mêmes actes sur des femmes inconscientes, sans savoir que c'était du viol. Il a ensuite annoncé vouloir lancer une association pour "que les hommes comme moi comprennent qu’il faut avoir le consentement".

La soumission chimique

"Dans l'inconscient collectif, la soumission chimique se restreint à un verre d'alcool avec du GHB dans un bar. En réalité, c'est beaucoup plus que cela" avait déclaré sur Konbini la fille de Gisèle Pelicot, Caroline Darian, qui est à la tête de l'association M'endors pas, Stop soumission chimique. Sur le portail du site de son association, voici la définition qui en est donnée : "La soumission chimique désigne l’administration d’une ou plusieurs substances psychoactives à l’insu des victimes ou sous la menace, à des fins criminelles ou délictuelles". 

Le rapport d'enquête de l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) de 2021 souligne que ce sont le plus souvent des médicaments qui sont utilisés dans le cadre d'une soumission chimique, plutôt que des drogues. Ce qui est le cas de l'affaire Pelicot, Gisèle ayant été endormie avec des somnifères et des anxiolytiques, cachés dans sa nourriture. Cette histoire met notamment en lumière la soumission chimique dans le cadre privé, l'une des revendications de l'association qui aimerait faire comprendre qu'elle ne se limite pas au monde de la nuit.

Le huis clos 

Un procès tenu à huis clos signifie qu'il n'est pas public, ainsi aucune personne extérieure ne peut y assister. Ce terme a été beaucoup discuté lors du procès concernant la diffusion des vidéos des viols. Dés le début du procès, la victime, Dominique Pelicot, souhaitait qu'elles soient visionnées par le public afin d'ouvrir le débat et éveiller les consciences. "Notre décision a le pouvoir de changer les choses, c’est dans les prétoires que se forge l’histoire", a déclaré le deuxième avocat de Gisèle Pelicot, Me Antoine Camus, auprès de BFMTV

Le 20 septembre, le président de la Cour avait décidé que le visionnage des vidéos des viols se ferait à huis clos sous prétexte que les "images étaient choquantes et indécentes". Une décision qui vient d'être levée ce vendredi 4 octobre suite à la demande de Gisèle Pelicot et ses avocats, relate Midi Libre. La victime avait exprimé son souhait que "la honte change de camp". 

La portée internationale  

Plusieurs manifestations ont été organisées à travers la France dans le but de soutenir Gisèle Pelicot. Un soutien qui a fini par dépasser les frontières. L'histoire de l'affaire ayant retentie dans le monde entier, l'association australienne Older Women’s Network a organisé une collecte de fonds en soutien à la femme, selon Le Parisien"Quand on a vu que Gisèle avait fait le choix de renoncer à son anonymat et d’exposer au grand jour ces crimes absolument atroces, on s’est dit : ’Wow, c’est une championne’", a déclaré Yumi Lee, présidente de l'association. 

Le "#Not all men"

Ce hashtag, qui existe déjà depuis plusieurs années, est apparu à de nombreuses reprises sur les réseaux sociaux au moment de l'ouverture du procès. Relayé notamment sur X et TikTok, le "#Not all men" ("Pas tous les hommes", en français), souligne l'idée que tous les hommes ne sont pas coupables, et dans le cadre de cette affaire, pas tous des violeurs. Ce qui a frappé dans ce procès au départ, c'est notamment que parmi les 51 accusés, tous les profils d'hommes sont représentés, déconstruisant ainsi l'imaginaire collectif d'un violeur au profil type.

Cette expression est dénoncée par les mouvements féministes car elle finit par détourner le débat et invisibiliser la victime, en concentrant l'attention sur les accusés. 

Dans une tribune au Monde, la philosophe Camille Froidevaux-Metterie a écrit : "Que ceux qui n’ont pas honte et ne se sentent coupables de rien comprennent que leur innocence individuelle n’est pas un argument. Oui, tous les hommes sont coupables : coupables de refuser de s’éduquer pour comprendre la dimension systémique des violences sexuelles, coupables de ne pas prendre part à nos combats, coupables de ne pas avoir honte, d’être restés, jusque-là, des indifférents ordinaires."

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