“C’est un scandale, on le laisse mourir” : les commerçants du marché de Plan-Cabanes, à Montpellier, sont à bout

"C’est un scandale, on le laisse mourir" : les commerçants du marché de Plan-Cabanes, à Montpellier, sont à bout

Un appel à l’aide pour Thierry, William, Lakhdar et tous les commerçants de la place. Midi Libre – T. J.

Il est l’un des marchés historiques du centre-ville et pourtant ce n’est plus que l’ombre de lui-même. En désespoir de cause, les étaliers demandent de l’aide… et envisagent de lancer un ultimatum à la Ville lors de la prochaine commission municipale, le 23 septembre.

Lakhdar : "Cette année, je n’ai pas gagné d’argent, j’ai sorti l’argent de ma poche, j’ai fait des crédits. Je vais dans le mur à 400 % !"
– William : "On y va droit !"
– Thierry : "Et pourtant, ce sont des travailleurs, ils sont là six jours sur sept."

À Plan-Cabanes ce vendredi, il y a sept étals : deux primeurs, deux bazars, un textile, une épicerie fine italienne, un traiteur. Ces professionnels sont plus qu’inquiets face à un constat : "Regarde autour de toi, c’est triste, il n’y a personne !" Effectivement, si les voitures se comptent au compte-goutte sur le boulevard, c’est aussi le cas des clients du marché. "Ils ont fermé trois rues : Emile-Zola, Auguste-Comte, Saint-Louis, souligne Thierry, le représentant des étaliers du marché. Plus personne n’arrive par les Arceaux."

Pêle-mêle, ils évoquent les accès, le prix du barnum, le deal, la concurrence…

Ce problème n’est pas nouveau, fruit de la stratégie d’éviction des voitures voulue par la mairie, avec un parking Gambetta plus que difficilement accessible, la place Saint-Denis et Clemenceau condamnés, sans parler de l’arrivée par les Arceaux…
Ce que demandent ces professionnels, c’est que l’on s’occupe d’eux. "Il nous faut monter en qualité. Ça fait des années, qu’on réclame un boucher, un fromager, un charcutier…" La qualité, le mot revient en continu. Pour les produits vendus. Mais aussi pour les installations. "Nos barnums ont dix ans, ils sont morts, complètement rafistolés, ça donne quelle image ? Pour les changer il nous faut plus de 2000 €. Rien que changer la toile, c’est 500 balles, une barre métallique, 80 balles. On ne les a pas, il faut nous aider."

"Maximum 100 € ici. À Mas Drevon, je fais 600 €-700 €"

Pour eux, c’est évident, le marché se meurt. Les clients ne viennent plus et eux, tout seuls, n’ont pas les moyens de les attirer. Victor Hugo (de son prénom) lâche son stand de textile et se joint à la conversation. "Je suis ici toute la semaine. Sauf le samedi, je suis à Mas Drevon. Ici, je fais 50-60 € par jour. Maximum 100 €. À Mas Drevon, je fais 600 €-700 €." Lakhdar enchaîne : "Je ne travaille pas. Je fais 100-150 € par jour. Dans le quartier, de l’autre côté de la rue, il y a d’autres fruits et légumes qui viennent d’Espagne, ils les bradent. Moi, je me fournis au Marché gare. 100 €, pour payer mon emplacement, mes produits, le gazole pour aller au marché gare, je ne vis pas." Ils évoquent le quartier, le deal, le boulevard Gambetta que les clients ont du mal à traverser. Chacun son côté de sa rue.

"Il y a un abandon des marchés d’ordre général"

Président du syndicat des halles et marchés de Montpellier, Jean-Pierre Touchat, installé sur la Comédie, est encore plus sévère. "Ce qu’il se passe au Plan-Cabanes, c’est un scandale, on le laisse mourir. Il est tricentenaire. On trouve des traces de son existence à la fin des années 1700. La Ville ne veut pas ouvrir un filet d’accès véhicules pour y arriver. Mais ce n’est pas propre à Plan-Cabanes. Il y a un abandon des marchés d’ordre général : Plan-Cabanes, Paillade, Comédie… Il faut une politique de dynamisation des marchés, c’est la plus vieille forme de commerce qui existe au monde."

“J’adore ! J’y vais avec plaisir, et peut-être un peu par nostalgie”

Marion, quinqua dynamique, connaît le marché du Plan-Cabanes par cœur.

"J’adore ! Même s’il y a moins de monde, que je le vois s’étioler d’année en année, j’adore. Ma grand-mère m’y amenait quand j’étais petite, dans les années 1980. Il devait y avoir vingt commerçants. Ce qu’il s’est passé ? Il a été déplacé place Salingro, c’était difficile. Des gens ont pris leur retraite aussi. Et puis le quartier n’est par forcément bankable, ça deale. Je suis allée aux Arceaux ou à Castellane, c’est différent. La qualité et le prix. Je vais chez Claire en primeur, elle fait de la qualité, c’est deux ou trois moins cher. Et aux Arceaux, c’est blindé. À Plan K, on te fait goûter les fruits que tu achètes. J’y vais tout le temps le week-end. J’y vais à vélo, j’achète mon poulet et il m’offre un thé à la menthe ou un café et on discute. C’est cool. J’y vais avec plaisir. Et peut-être un peu par nostalgie. J’y ai élevé ma fille aussi. Tous les fruits et légumes qu’elle a goûtés dans sa poussette, c’était à Plan K."

Tous poussent dans le même sens et se tournent vers la mairie. Pour Thierry, la coupe est pleine. Le représentant des professionnels du Plan-Cabanes attend avec impatience le 23 septembre prochain, jour de la prochaine réunion de leur commission.

"J’en ai marre"

Pour lui, il n’a pas le choix : il posera à "un ultimatum. J’en ai marre de répéter 50 000 fois les choses. Ils ont fait un geste, on a eu deux exonérations de trimestre. Mais le parking était fermé. Il faut monter en qualité avec des commerçants qui amènent du monde et il faut plus d’accessibilité." Et sinon ? L’idée est évoquée de bloquer le tramway un matin à 8 h mais elle ne fait pas l’unanimité, ils veulent éviter le rapport de force. Mais ils sont à bout. "On ne peut même pas partir, notre affaire ne coûte plus rien."

“Il va falloir booster l’offre”

Selon Alban Zanchiello, adjoint au maire en charge du commerce, la Ville cherche des solutions et est à l’écoute des étaliers du Plan-Cabanes.

Est-ce que, oui ou non, vous laissez mourir le marché du Plan-Cabanes ?
Non. Je fais une réunion avec tous les marchés toutes les huit semaines. Tous les sujets sont sur la table, sans tabou. Et ma porte est ouverte.

Ils lancent un appel à l’aide. Comment pouvez-vous les aider ? Ils espèrent de nouveaux étals (bouchers, fromagers…).
Oui, une redéfinition du modèle économique avec une nouvelle offre serait une bonne chose, et attirerait du monde. Après, je pense que la proximité du marché des Arceaux aussi est compliquée, j’espérais que l’un nourrirait l’autre. Il va falloir booster l’offre.

Ils espèrent aussi un accès voiture facilité…
Le plan de circulation est ce qu’il est, il ne bougera plus. Le marché est sur une place avec une station de tramway. Il y a eu beaucoup de travaux en ce qui concerne les accès, ça a pu être perturbant mais maintenant c’est fini. Non, je ne peux pas laisser dire qu’on laisse le marché à l’abandon.

Le deal à quelques pas est aussi un problème…
C’est une lutte permanente. On insiste, ça prend du temps.

En désespoir de cause, les commerçants envisagent de vous poser un ultimatum…
Est-ce que cela irait en leur faveur ? Ma porte est ouverte. Il faut qu’on discute. Maintenant, je n’ai pas la solution à tout mais je fais le maximum.

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