Dernière production de l’Opéra de Montpellier, “La bohème” est un régal sur tous les tableaux !

Dernière production de l'Opéra de Montpellier, "La bohème" est un régal sur tous les tableaux  !

Au Paris initial de 1830, cette production a préféré celui des années 1920; ce qui autorise un glissement (réussi) vers le cabaret. Marc Ginot – OONM.

Mise en scène stylisée, direction élégante et gracile, interprétation moderne et tonique, l’opéra “La bohème” régale Montpellier ! Les trois représentations à l'opéra Berlioz affichent inexorablement complet, mais on pourra apprécier gratuitement une projection de cette production le dimanche 2 juin sur la place royale du Peyrou !

Douze ans que le chef-d’œuvre de Puccini n’avait pas plus été donné à Montpellier, où les opéras mis en scène sont devenus rares, eux qui étaient déjà précieux… Forcément, les trois représentations de La Bohème, coproduction de l’Opéra-Orchestre national de Montpellier et de l’Irish National Opera, ont été prises d’assaut. Bien avant même que de savoir que celui qui allait diriger l’orchestre serait son futur directeur musical : Roderick Cox.

Nonobstant, c’est la mise en scène d’Orpha Phelan, indissociable des décors et costumes de Nicky Shaw, qui tape immédiatement dans l’œil… et qui tape juste. Elle a choisi de déplacer l’action dans le Paris efflorescent de l’Entre-deux-guerres, une époque dont la modernité n’a, si l’on ose dire, pas pris une ride en un siècle. En outre, en ces nouvelles années 20, qu’on se gardera bien de qualifier de “folles”, elles, les mots, et les maux, précarité, misère, maladie, reviennent dans le vocabulaire artistique…

Dernière production de l'Opéra de Montpellier, "La bohème" est un régal sur tous les tableaux  !

Enfin, bref, le décor, mobile, modulable, tout en fausses perspectives et lumières expressionnistes, figure sans excès, ici un intérieur d’atelier d’artistes déserté par le confort, là une rue animée et ampoulée du Quartier latin, ailleurs la désolation neigeuse de la Barrière d’enfer… Un tremplin parfait pour faire décoller notre imagination, nos émotions… et surtout l’expression d’une distribution impeccable. Plus que leur jeunesse et leur diversité (qui sont réjouissantes, sans constituer en soi des qualités proactives), ce sont leur engagement, leur homogénéité et leur talent dans le jeu comme dans le chant qui épatent, au fil des quatre tableaux du mélodrame.

Des rires aux larmes

Dans un premier temps, on se régale de la complicité de Rodolfo (Long Long), Marcello (Mikolaj Trabka), Schaunard (Dominic Sedgwick) et Colline (Dongho Kim) : ils tirent le diable par la queue, mais ils l’ont aussi au corps, ça compense, c’est chouette à voir, et leur humour noir s’avère très contemporain. Le premier duo du chaleureux Rodolfo avec la gracile Mimi (Adriana Ferfecka) est délicieux, plein de délicatesses vocales et gestuelles, on croit à leur coup de foudre. O Soave Fanciulla ! Le tableau de la bohème parisienne est un autre bonheur, forcément plus spectaculaire, avec ses terrasses bondées, son Parpignol enjoué (Hyoungsub Kim), sa ribambelle de gamins… et le formidable charivari servi impeccablement, et allègrement, par les chœurs de l’Orchestre et d’Opéra Junior. La savoureuse joute amoureuse entre Marcello et Musetta (Julia Muzychenko) est l’occasion d’un glissement esthétique et géographique particulièrement bien vu du côté du cabaret berlinois, bas résille, corset et chapeau claque compris !

Le contraste est saisissant avec le retour quelques mois plus tard, aux portes de la ville, dans une ambiance nocturne de film noir. Il n’est plus le temps de rire d’une fortune qui ne joue qu’en revers mais de prendre une première balle en plein cœur. Les adieux de Mimi, Donde lieta uscì al tuo grido d’amore, sont déchirants, et nous offrent l’occasion de vanter le raffinement infini de l’orchestre de Montpellier que la direction fine et élégante de Roderick Cox incite à des merveilles de voltige légère.

Dernière production de l'Opéra de Montpellier, "La bohème" est un régal sur tous les tableaux  !

On n’est évidemment pas au bout de nos peines : le dernier tableau n’est pas reluisant pour les personnages mais éblouissant pour nous qui en sommes les témoins. Du manque d’amour qui ne crève pas ? Pour sauver Mimi, on met au clou son manteau chéri, et la basse de Dongho Kim a des vibrations métaphysiques. Mais la belle s’éteint lentement. Sono andati ? Fingevo di dormire. Soutenue par la force tragique de Long Long, Adriana Ferfecka expire avec une intensité adamantine telle qu’elle fissure le plafond de l’opéra qui laisse passer la pluie… Mais non, c’est nous : mince, on pleure.

Projection gratuite au Peyrou

Enregistré par les caméras deFestivisuel, le spectacle “La bohème” sera rediffusé gratuitement en plein air sur la place royale du Peyrou le dimanche 2 juin à 20 h. Un Évènement qui est rendu possible grâce aux profits générés par la vente de places du “Dîner sur scène de l’opéra” et avec le soutien d’Altémed, premier mécène de l’Opéra Orchestre, et de Montpellier Méditerranée Métropole. Une occasion unique de (ré) découvrir ce chef-d’œuvre de l’opéra italien dans un cadre historique, décontracté et familial… Dans la limite des places disponibles.
 

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