“Il y a des aliments à haut risque qu’on ne doit pas proposer aux tout petits” : bactérie E.coli, allergies… les règles à respecter

"Il y a des aliments à haut risque qu'on ne doit pas proposer aux tout petits" : bactérie E.coli, allergies... les règles à respecter

Des interdictions jusqu’à l’âge de 10 ans pour le lait cru et la viande mal cuite. Midi Libre – MICHAEL ESDOURRUBAILH

Quelles sont les erreurs à ne pas faire dans l'alimentation de nos enfants ? Contaminés en décembre par la bactérie E.coli présente dans du morbier, des enfants souffrent aujourd'hui d'un syndrome hémolytique et urémique (SHU), dangereux pour les reins, a indiqué cette semaine Santé publique France. Julie Carillon, docteure en nutrition, donne des clés.

Julie Carillon, docteure en nutrition, est l'auteure du livre "108 questions et leurs réponses, pour tout savoir sur l'alimentation de votre enfant de 0 à 2 ans" (ed. Hatier), et créatrice d'Hamstouille, une plateforme digitale de conseil aux parents créée n 2020 dans l'Hérault, en accès libre et sur abonnement payant pour un conseil personnalisé, via une équipe de quinze personnes qui travaillent sur l'alimentation de 0 à 6 ans.

"Il y a des aliments à haut risque qu'on ne doit pas proposer aux tout petits" : bactérie E.coli, allergies... les règles à respecter

Julie Carillon, autrice du livre "108 questions et leurs réponses pour l'alimentation de votre enfant". DR

Un problème d'intoxication alimentaire à la bactérie E.coli après que des enfants ont mangé du morbier est encore dans l'actualité, une actualité récurrente puisque chaque année, Santé publique France enregistre au moins une centaine de déclarations de syndromes hémolytiques et urémiques, des infections causées par e.coli. Il faut être vigilant sur ce qu'on met dans l'assiette des enfants, on méconnaît des risques et des conséquences ?

C'est un message qu'on essaie de faire passer quotidiennement. Les recommandations de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), de l'association française de pédiatrie ambulatoire (Afpa), sont claires : jusqu'à cinq ans, il faut faire très attention, et aujourd'hui, même pour le lait cru et la viande crue ou pas cuite, il y a des interdictions jusqu'à l'âge de dix ans. 

Effectivement, ce sont des aliments qui sont à haut risque, et on ne devrait pas les proposer aux tout petits. 

Tout ce qui est lait cru, et plats cuisinés, ou produits de restauration rapide, le burger, la pizza ?

Il n'y a pas de recommandations sur les plats préparés, sachant que plus un plat est préparé dans des conditions d'hygiène favorable, moins il y a de risques pour l'enfant. Il y a moins de risques sur ce qui est surgelé, et sur ce qui est préparé par la grande industrie.

Mais parfois, une bactérie se met dans la chaîne de fabrication. Le risque d'avoir cette bactérie est le même pour tout le monde, chez l'enfant et chez l'adulte. Mais le problème est que l'enfant a un système immunitaire qui est trop fragile, et l'infection, que contractera aussi l'adulte, peut être grave pour lui, avec des séquelles.

Ce qui est le cas des "Shun", les syndromes hémolytiques et urémiques, qui provoquent notamment des séquelles rénales, neurologiques…

Oui, exactement.

"Il ne faut pas donner de miel à un enfant avant l'âge d'un an"

Jusqu'à quel âge faut-il être très vigilant ?

Tout dépend de l'aliment dont on parle. On distingue trois tranches d'âge, avec beaucoup d'interdits avant l'âge de cinq ans.

Il ne faut pas donner de miel à un enfant avant l'âge d'un an parce qu'il y a un risque de botulisme. Pour tout ce qui est lait cru et viande crue ou mal cuite, on estime qu'il ne faut pas en proposer avant l'âge de dix ans car il y a vraiment trop d'accidents. Et pour les œufs crus ou mal cuits, les poissons ou les fruits de mer crus ou mal cuits, pas avant l'âge de cinq ans.

Les grandes étapes de la diversification alimentaire ont-elles changé, par rapport à ces problématiques ?

Pas par rapport à ces problématiques. Mais en revanche, il y a eu beaucoup de changement en 2019-2020, on a plutôt simplifié la diversification.  Avant 2019-2020, c'était complexe, et les conseils différaient d'un endroit à un autre. 

Santé publique France a homogénéisé tout ça et a dit, en résumé, qu'on pouvait donner de tout aux enfants, excepté ces aliments à haut risque de toxi-infection, sans trop réfléchir à l'ordre, et en mangeant comme le reste de la famille, avec une alimentation la plus variée possible.

À partir de quel âge peut-on commencer une diversification alimentaire ?

Entre 4 et 6 mois, quand le bébé est prêt, tout dépend de l'enfant. 

"Il faut proposer de tout dès le début, y compris des aliments à haut risque d'allergie"

Sans risque d'allergie, un autre problème qui suscite l'inquiétude des parents ?

Plus on va retarder l'introduction de certains aliments, et notamment ceux qui sont à haut risque d'allergie, plus il y a de risque de développer une allergie. C'est pour ça qu'on dit qu'il faut tout proposer dès le début. À 4-6 mois, on recommande la cacahuète, la noisette, la noix de cajou, l'œuf… tous ces aliments réputés allergènes.

Plus tôt on les propose, mieux c'est, y compris chez les bébés qui ont un papa ou une maman qui ont fait un choc anaphylactique avec ces aliments. On diminue ainsi le risque par la suite. Il faut proposer ces aliments tôt, et régulièrement, pour qu'une tolérance se maintienne.

Ce serait préventif en termes d'allergie ?

A priori oui. On travaille beaucoup dans ce sens-là depuis 2005-2006. Ce qui n'empêche pas qu'il y a de plus en plus d'allergies alimentaires en raison de notre mode de vie et de notre environnement. 

Vous conseillez du bio systématiquement ?

Dans l'absolu oui, mais chaque famille fait ce qu'elle veut en fonction de ses moyens et de ses valeurs.

"Il y a des aliments à haut risque qu'on ne doit pas proposer aux tout petits" : bactérie E.coli, allergies... les règles à respecter

Et sur l'allaitement maternel ?

La question est tranchée depuis longtemps, tout le monde est d'accord sur le fait que l'allaitement est ce qu'il y a de mieux pour le bébé, mais on a un lobby laitier qui est fort… l'allaitement a toujours été recommandé, exclusivement jusqu'à 4 à 6 mois, et jusqu'à deux ans en introduisant la diversification.

Bien évidemment, dans la société actuelle, allaiter et allaiter longtemps n'est pas permis à toutes les mamans. Beaucoup ont du mal à démarrer car il y a un manque d'accompagnement, et même celles qui y arrivent rencontrent des difficultés avec le retour au travail. Il ne faut pas culpabiliser les mères qui n'allaitent pas, qui ne veulent pas ou ne peuvent plus. Il nous arrive aussi de dire à certaines mamans de réfléchir car elles s'épuisent à vouloir continuer, et que l'allaitement met en péril leur santé mentale et physique. 

"Si on veut que l'alimentation soit saine et variée sur le long terme, il faut montrer l'exemple"

Quelles sont les idées reçues qu'on a sur l'alimentation des enfants et qui sont des non-sens ?

On voit beaucoup de familles faire très attention pendant la diversification alimentaire de leur bébé, avec du bio, du sans sucre, des produits frais, et quand le bébé a un an et demi et qu'il commence à manger comme le reste de la famille, on passe sur une alimentation qui peut être beaucoup moins saine. C'est aberrant !

L'alimentation et le comportement alimentaire futur se façonnent pendant les six premières années de la vie. Ce n'est pas parce qu'on aura fait goûter des légumes à un enfant jusqu'à l'âge d’un an qu'il en mangera derrière, si nous, on n'en mange pas.

SI on veut que l'alimentation soit saine et variée sur le long terme, il faut déjà montrer l'exemple et manger de tout en famille. On sait aussi que les 1 000 premiers jours sont importants pour le développement de beaucoup de choses, y compris l'alimentation.

Il y a aussi la problématique de l'obésité, qui commence souvent dans la petite enfance. Beaucoup de parents sont perdus sur les équilibres de base ?

Sur le terrain, on fait de la prévention auprès des familles parce que dans la génération de parents d'aujourd'hui, beaucoup ne savent pas construire des menus et n'ont jamais appris à s'alimenter pour répondre aux besoins du corps.

Le plus gros problème, c'est le sucre, on mange beaucoup trop de sucre, il y en a partout dans l'alimentation industrielle, aussi bien dans les gâteaux que dans les légumes industriels.

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