La critique de Fabrice Andrivon : dans “la Zone d’intérêt”, le quotidien du chef de camp d’Auschwitz
|La vie côtoie l’horreur, toute proche. DR – Leonine
Ce film de Jonathan Glazer est programmé cette semaine au Trianon de Mende.
Jonathan Glazer s'attaque à un sujet délicat avec la Zone d'intérêt : filmer le quotidien de Rudolf Höss, chef du camp d'Auschwitz. On soupçonne la somme de pincettes qu'il faut y mettre, mais d'entrée de jeu, le cinéaste choisit une option inédite et très intelligente : ne jamais montrer les horreurs commises par Höss, qui ne sont que suggérées par les sons qu'on entend ou par quelques motifs horribles (un train, un convoi…).
À la place, on a droit à une minutieuse description du quotidien de notre homme et de sa petite famille, tranquillement installés dans une villa de luxe à quelques mètres du camp. Oui : les pires bourreaux sont des êtres humains, et il est possible d'avoir une vie tranquille en côtoyant le pire. Mais le film, par quelques signes discrets, nous suggère que ça ne va pas sans certaines conséquences.
Un des plus grands tabous de l'Histoire
Glazer filme tout ça objectivement, avec tout un système de caméras installées dans le décor, ce qui lui permet de développer une atmosphère "d'objectivité", renforcée par un montage extraordinairement carré.
Le scénario stagne certes un peu et une fois le principe compris, le film a du mal à dire autre chose que ça. Mais la trame est finalement peu importante : on reste baba devant cet objet formel, épuré comme un diamant.
Les sons anxiogènes, cette musique terrible et quelques petits effets purement cinématographiques sont les bienvenus pour apporter une touche de style dans un film qui aurait été trop désincarné sans eux. Glazer est définitivement un des plus grands et réalise un film très intelligent sur un des plus grands tabous de l'Histoire.
Je m’abonne pour lire la suite