L’abattoir mobile et paysan des Cévennes lozériennes espéré pour l’été 2025
|Une semi-remorque a d’ores et déjà été achetée pour accueillir le futur abattoir mobile et paysan. – PETR 48
Une vingtaine d'éleveurs ont créé, en 2019, l'association Structure locale d’abattage coopératif (Slac). Aidés notamment par le Pôle d'équilibre territorial et rural (PETR) Sud-Lozère, ils espèrent un aboutissement rapide de leur projet. Le point sur cette initiative.
Ne plus imposer aux animaux de longues heures de route jusqu'à Antrenas ou Alès, le plus souvent l'été sous de fortes chaleurs ; réduire leur empreinte carbone ; gérer eux-mêmes toute la chaîne de production, sans déléguer la tâche la plus ingrate à autrui ; garantir une meilleure qualité de la viande… Autant de raisons qui ont poussé une vingtaine d'éleveurs des Cévennes à se regrouper pour élaborer un projet d'abattoir mobile et paysan, uniquement pour les ovins et les caprins.
S'il voit le jour, cet équipement s'appuiera sur l'atelier de découpe et de transformation de la Coopérative d'utilisation de matériel agricole (Cuma) des Hauts-Gardons, à Sainte-Croix-Vallée-Française. Pour y parvenir, l'association Structure locale d’abattage coopératif (Slac) a été créée en 2019. Les exploitants qui la composent sont principalement installés en Vallée française et en Vallée longue, ainsi qu'à Vébron, Saint-André-de-Valborgne et autour de Florac. Tous espèrent une mise en service à l'été 2025.
Un caisson d'abattage mobile de ferme en ferme
L'abattoir mobile sera installé dans une semi-remorque déjà acquise par la Slac pour quelque 70 000 €, et en partie aménagée. "Elle bénéficiait d'un agrément temporaire pour la fête musulmane de l'Aïd el-Kebir", précise Louise Daunizeau, chargée de mission agriculture au Pôle d'équilibre territorial et rural (PETR) Sud-Lozère, qui accompagne l'initiative dans le cadre du programme Terra rural. "Elle n'est cependant pas aux normes pour de l'abattage traditionnel. Trente mille euros de travaux sont nécessaires." Une station d'épuration mutualisée avec l'atelier de découpe devra aussi voir le jour.
Une semi-remorque a d'ores et déjà été achetée pour accueillir le futur abattoir mobile et paysan.
En plus de ce nouvel outil, où pourront être effectuées toutes les étapes de la chaîne d'abattage, la Slac souhaite acquérir un caisson d'abattage mobile. Celui-ci permettrait de procéder à l'étourdissement et à la saignée directement à la ferme, avant une évacuation de l'animal vers la semi-remorque, à Sainte-Croix-Vallée-Françaises, pour les autres tâches : coupe des pattes et dépouille, éviscération, fente, parage, réfrigération… Un investissement qui permettrait donc aux éleveurs de mettre fin aux jours de leurs bêtes à l'endroit où elles sont nées et où elles ont toujours vécu.
Valorisation des déchets
Une fois son abattoir mobile et paysan en service, l'association Structure locale d'abattage coopératif souhaite valoriser au maximum les déchets, à commencer par les panses, lourdes et coûteuses, pour en faire des tripes. Pour se faciliter le travail, les éleveurs prévoient également l'achat d'une blanchisseuse.
De nombreux partenaires
"Une étude technico-économique de faisabilité a été financée par le programme Leader, le Département et le PETR Sud-Lozère, rappelle Louise Daunizeau. Nous avons travaillé avec des architectes, avec un éthologue ou encore avec un consultant sur l'abattage alternatif. Il a aussi été question de la structuration juridique, du modèle économique et de l'agrément sanitaire." Le syndicat des Hautes Vallées cévenoles, le Parc national des Cévennes, la FR Civam Occitanie, l'Adear 48, l'Institut agro-campus de Florac et l'Entente interdépartementale des causses et des Cévennes soutiennent aussi ce projet d'abattoir mobile et paysan.
L'association Structure locale d'abattage coopératif prendra à sa charge les aménagements mobiles. La communauté de communes Des Cévennes au mont Lozère assurera la construction des parties fixes : un bureau, la chambre froide de ressuage des carcasses, la chambre froide des déchets, le toit au-dessus de la placette pour garantir de l'ombre à la semi-remorque. Des travaux estimés à quelque 200 000 € et qui pourront être accompagnés d'une série de subventions (État, Département, Région, Leader…).
"Les éleveurs seront tous tâcherons"
Une fois lancé, l'abattoir restera ouvert à de nouveaux adhérents, à une seule condition : mettre la main à la pâte. "Les éleveurs seront tous tâcherons et ne réaliseront pas de prestation de service", prévient la chargée de mission. Une quarantaine de bêtes pourront être tuées par session. La Slac projette de produire 8 tonnes de carcasses la première année, avant une montée en puissance jusqu'à 10 tonnes par an.
Les citoyens qui souhaitent soutenir ce projet peuvent le faire via la cagnotte en ligne "Un outil d'abattage coopératif et paysan en Cévennes" sur le site www.miimosa.com. Celle-ci a recueilli 23 117 € (ce lundi 26 février 2024, NDLR) en seulement trois semaines. La preuve que l'attente des consommateurs est grande.
La réglementation européenne et française
Le 14 décembre 2023, la Commission européenne a fait évoluer son règlement en matière d'abattage à la ferme : "Sur la base de l’expérience acquise par les exploitants du secteur alimentaire et les autorités compétentes et compte tenu de l’intérêt croissant porté au bien-être animal pendant le transport, il convient d’étendre la possibilité d’étourdissement et de saignée des ongulés dans l’exploitation, dans le respect d’exigences spécifiques, aux animaux des espèces ovine et caprine et aux autres ongulés, quelles que soient leurs conditions d’élevage."
Le texte prévoit par ailleurs des quotas par session d'abattage : "Jusqu’à trois animaux domestiques de l’espèce bovine, à l’exception des bisons, jusqu’à trois solipèdes domestiques, jusqu’à six animaux domestiques de l’espèce porcine ou jusqu’à neuf animaux des espèces ovine ou caprine peuvent être abattus à la même occasion dans l’exploitation d’origine, lorsque l’autorité compétente l’autorise."
Pour que ces nouvelles mesures entrent en vigueur, il faudra d'abord que le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen les approuvent
En France, depuis 2018 et la loi EGalim, des expérimentations en matière d'abattage à la ferme sont autorisées. La Confédération paysanne porte cette revendication depuis une décennie.
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