Mort de John Mayall : le “professeur” de la révolution blues britannique des sixties, est décédé à l’âge de 90 ans
|Dans la région, on avait pu voir John Mayall au festival Bagnols Blues, mais également au Rockstore, à Montpellier, à plusieurs reprises. Midi Libre – MIKAEL ANISSET
Mort le 22 juillet à l’âge de 90 ans, le chanteur, harmoniciste, claviériste et guitariste John Mayall a été l’un des principaux artisans du British blues boom qui a déferlé sur l’Angleterre au milieu des années 1960 et révolutionné la pop music. Eric Clapton, Peter Green, Mick Taylor… il aura contribué à révéler quelques-uns des guitaristes anglais les plus cruciaux.
Le rock’n roll a Elvis Presley, le blues John Mayall. Oh, certes, la postérité a été moins généreuse avec l’Anglais qu’avec l’Américain, mais la vérité historique demeure : de même qu’Elvis Presley fit exploser la "musique du diable" aux oreilles de millions de petits blancs, John Mayall déclencha dix ans plus tard chez ces mêmes visages pâles, la plus soudaine des passions pour la "musique des âmes perdues". On appela ça le British blues boom.
En 1964, John Mayall est âgé de 31 ans, il a quitté Macclesfield, une petite ville près de Manchester, pour rallier Londres dans une ferme intention : graphiste designer de formation et d’expérience, il veut devenir musicien de blues. En 1964 donc, il enregistre le tout premier album made in England de cette musique typiquement afro-américaine à laquelle il va consacrer toute son existence.
Mais c’est en 1966 qu’il provoque la fameuse explosion (le "boum" donc) avec le disque Blues Breakers with Eric Clapton, rebaptisé par ses fans Beano du nom de la bande dessinée que le jeune guitariste fraîchement débarqué des Yardbirds lit sur la photographie en pochette.
La pouponnière de Cream et bien d’autres
Pour la première fois, on y entend des solos de guitare énormes, lyriques et surtout ultra saturés dans une approche "blanche" du blues qui fera ensuite florès (le fameux blues-rock). Clapton y gagnera son surnom de God ("dieu", rien que ça !) et Mayall, sa place au panthéon du rock. Après ce coup d’éclat, Eric Clapton quitte John Mayall, embarquant avec lui le bassiste des Blues Breakers, Jack Bruce, et ensemble, ils fonderont le premier "power-trio" de l’histoire, Cream (qui influencera Jimi Hendrix, mais ça, c’est une autre histoire).
Quant à John Mayall, il continuera à prêcher la bonne parole du blues avec une nouvelle formation comptant dans ses rangs Mick Fleetwood, John McVie et, nouveau prodige de la six-cordes, Peter Green. En 1967, l’histoire se répète : ces trois pointures l’abandonnent pour former Fleetwood Mac. Pas grave, John Mayall dont le flair est aussi sûr que les talents de musicien (voix, piano, harmonica, guitare…) dégotte un nouveau virtuose de la guitare d’à peine 18 ans : Mick Taylor. Et devinez, si vous ne le savez pas déjà, ce génie tourmenté sera engagé en 1969 par les Rolling Stones ! Il passera cinq ans avec eux et réintègrera les Blues Breakers en 1982…
"En fait, John Mayall est à la tête d’une incroyablement bonne école pour les musiciens", résumera Eric Clapton, avec à-propos. En soixante ans de carrière et plus de soixante albums, pour moitié des enregistrements live (avec et sans ses Blues Breakers), John Mayall aura ainsi fait travailler, et souvent "éduqué", quelques-uns des musiciens les plus importants du rock, et parfois, souvent – c’est ainsi -, plus célébrés que lui… Mais si l’étoile de ceux-ci a pu fluctuer au fil des décennies, la sienne, veilleuse précieuse indiquant invariablement la direction essentielle, la base, le blues, n’aura jamais ô grand jamais pâli. Elle s’est simplement éteinte le 22 juillet paisiblement dans sa maison californienne, entourée de sa famille.