Quitter le Liban à tout prix : le calvaire des populations qui tentent désespérément de fuir la guerre
|Le hall des départs de l’aéroport Rafik Hariri à Beyrouth. A.C.
Depuis l’attaque aux bipeurs et talkie-walkies les 17 et 18 septembre derniers et l’explosion consécutive du conflit entre Israël et le Hezbollah qui a déjà causé la mort de plus de 700 civils, de nombreux Libanais cherchent à quitter le pays. En même temps, la plupart des compagnies aériennes internationales ont suspendu leurs vols, les avions de la compagnie libanaise Middle East Airways sont pleins jusqu’au milieu de la semaine prochaine au moins, et les quelques billets qui restent sont au prix fort.
"600 $ pour un trajet Beyrouth – Koweit city, ça m’a coûté la peau des fesses !", raconte Tarek, qui a pris ce billet pour évacuer son fils afin qu’il rejoigne ensuite sa mère à Paris.
"Moi je dois rester, ma situation économique ne me permet pas de voyager." Ce père de famille fait les cent pas, inquiet, dans le hall des départs de l’aéroport, il attend que l’avion de son fils ait décollé avant de partir.
"Ils ont bombardé il y a dix minutes, à deux pas d’ici !" apprend-il soudain. Un raid israélien vient de frapper le Sud de Beyrouth, ce jeudi, tuant un haut commandant du Hezbollah et deux civils au moins. Le trafic aérien n’en a pas été perturbé.
Vols annulés
Depuis la semaine dernière, toutes les compagnies aériennes internationales ont annulé leurs vols à cause de l’embrasement du conflit.
Seul échappatoire aérien pour les Libanais, la compagnie locale Middle East Airways (MEA), et plus marginalement Iran Air et Qatar Airways qui ont maintenu quelques liaisons.
Mais pour quitter le pays depuis l’aéroport Rafik Hariri, le seul du Liban, il faut s’armer de patience et être prêt à débourser de lourdes sommes d’argent. Pour Paris par exemple, tous les vols sont complets. Les quelques billets qui restent pour des destinations moins populaires peuvent dépasser les 3 000€.
"Une forte demande"
"Nous observons une forte demande depuis l’embrasement du conflit, affirme Rima Mikaoui, directrice de relations publiques de MEA. Les passagers demandent n’importe quel ticket disponible. Pour pallier l’arrêt des opérations des autres compagnies, nous programmons des vols supplémentaires. C’est notre but de fournir à la population des options fiables pour quitter le pays."
L’autre voie de sortie de ce pays enclavé entre la Syrie et la Méditerranée est la voie terrestre, et la route de Damas, qu’on rejoint habituellement en une heure et demie depuis Beyrouth. C’est le choix qu’a fait Muhammad, Jordanien, qui, à l’instar des citoyens libanais, n’a nul besoin de visa pour entrer en Syrie.
Jeudi matin, il a pris un taxi à 5 h pour franchir la frontière syrienne vers 13 h, enfin. "Il y avait une file de voitures interminable, raconte-t-il. Les gens s’entassaient les uns sur les autres dans les véhicules, tout leur barda sur les toits, observe-t-il, espérant pour sa part rejoindre sa famille à Amman (Jordanie) dans la soirée.
Pas de rapatriement pour les Français
Les Français restés sur place et souhaitant quitter le pays ne pourront pas emprunter la voie terrestre, la Syrie ne délivre en effet pas de visa au poste frontière pour les Français.
De plus, l’ambassade de France à Beyrouth n’organise pas, pour l’heure, de rapatriement par avion tant que l’aéroport est ouvert, quand bien même la plupart des vols sont annulés.
"On affrétera un avion si l’aéroport est bombardé", glisse une source consulaire en charge des Français se trouvant au Liban.
"La situation est coincée, continue-t-elle. Il reste la voie maritime, mais les seuls bateaux qui vont à Chypre sont des croisières de luxe, et les trajets coûtent très cher."
Et de conclure : "Les gens vont devoir partir par leurs propres moyens".
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