“Un moment magique” : l’athlète biterroise Rosa Murcia Gangloff revient sur sa 4e place au marathon paralympique

"Un moment magique" : l’athlète biterroise Rosa Murcia Gangloff revient sur sa 4e place au marathon paralympique

Rosa Gangloff a bouclé le marathon des Jeux paralympiques en 3 h 13. Une expérience “incroyable”. MAXPPP – Frédéric LECOCQ

Éducatrice sportive à Béziers depuis 12 ans, Rosa Murcia Gangloff, 59 ans, était la seule Française engagée dans le marathon paralympique dans la catégorie T12 (déficients visuels), ce dimanche 8 septembre, où elle a décroché une très belle 4e place. Au lendemain de cette performance, cette championne au mental d’acier se projette déjà sur de prochaines compétitions. Entretien.

Au lendemain du marathon paralympique que vous avez bouclé en 3 h 13, arrivant à la 4e place. Comment vous sentez-vous ?

Sincèrement, je n’arrive pas à marcher. Les muscles des jambes sont contracturés. Et puis j’ai fait une grosse chute en bas des Champs Élysées avec la fatigue qui s’accumulait. J’ai donc des hématomes sur la cuisse, le bras et un joli bobo sur le genou. Ce sont les aléas de la course à pied. C’est aussi lié à mon problème de perception du relief. Je souffre d’une pathologie qui ne se voit pas sur moi (un glaucome a entraîné une cécité de son œil droit alors que son œil gauche évalue mal les reliefs, NDLR). Mais c’est quand même une belle aventure, incroyable, hors norme, à vivre. Un projet en 2 ans, ce n’était pas évident.

À 59 ans, vous étiez en effet la doyenne de la délégation française…

Oui et après les qualifications du mois d’avril, lors d’un premier marathon à Paris, il a fallu récupérer. Quand on est jeune, c’est déjà difficile, plus tard, c’est encore plus compliqué. Il faut 6 mois de récupération pour performer derrière. Là, je n’ai pas eu le temps.

Êtes-vous satisfaite de votre performance ?

Oui, je suis satisfaite de ce résultat car le parcours était très éprouvant et difficile. Beaucoup de femmes et d’hommes ont été très éprouvés à l’arrivée, car ça montait, ça descendait. Et il y avait la pression à digérer. Ce sont les Jeux. Avec un engouement du public qui nous porte. On n’a pas envie de décevoir. On aurait presque envie de répondre aux gens mais on ne peut pas, sinon on perd la concentration. J’étais la seule Française dans ce marathon, alors quand des milliers de personnes vous font une haie d’honneur, crient votre prénom, ça fait drôle, c’est impressionnant. Ce qui m’a le plus ému, c’est l’escorte des policiers et gendarmes lorsqu’on est parti du village pour assister à la cérémonie d’ouverture avec tous les athlètes paralympiques. Dans le bus, nous étions fiers d’être Français. Yannick Noah était avec nous, il avait les poils dressés. Qu’est-ce qui se passait ? Tout ça était pour nous ? Je peux vous dire qu’on avait envie de pleurer. On était des stars, enfin ce n’est pas le bon mot, on se sentait comme quelqu’un d’important. On a été bien protégés. Alors il faut qu’on arrête de râler. On a été choyés, aidés, ça a été extraordinaire, la délégation était extraordinaire, c’était une belle expérience de vie. Mes enfants sont venus me voir à l’arrivée, mon mari pleurait, c’était un moment magique qui m’appartient ainsi qu’à tous les Français.

Pensez-vous que cette ferveur populaire autour des Jeux paralympiques contribue au changement des regards sur le handicap ?

Le message de Teddy Riner (il a évoqué des "super héros" ce qui a été mal perçu par certains, NDLR) était beau. Au-delà de l’effort, de la souffrance, on se bat en plus contre une pathologie. C’est donc un compliment qu’a fait Teddy Riner, il a dit ce qu’il fallait : ce sont des héros, ils se battent en plus. Les gens ont vu la difficulté, les prothèses, les petites tailles. Le regard du public a changé et j’espère qu’il continuera à changer dans les écoles, etc. Car quand on côtoie tous les jours une personne atteinte d’un handicap, au bout d’un moment, on ne voit plus la pathologie. On est né avec, on vit avec, cela fait partie de nous. Beaucoup de monde l’a compris.

Il y a 32 ans déjà, vous participiez aux JO de Barcelone. Était-ce une expérience très différente ?

J’étais en lice, en valide, sur 10 000 mètres piste. J’ai été demi-finaliste il me semble, j’ai terminé dans les 20 premières en tous cas. Mais c’était plus fort ce dimanche, la pression était plus dure. Il a fallu gérer ses émotions, ce stress. Il y a 32 ans, j’étais davantage dans l’insouciance, à bientôt 60 ans, ce n’est plus la même chose ! Et puis je n’avais plus participé à un marathon depuis 30 ans. J’ai dû recommencer à zéro. Reprise, travail, endurance : le pari a été tenu, il n’était pas simple, pas facile. Mais je suis contente, j’ai atteint les minima et la 4e place qui donnent droit au "quota". Les championnats du monde sont normalement envisageables sans passer par la case qualifications.

Vous pensez donc déjà aux prochaines compétitions ?

Je suis boostée pour aller jusqu’en 2028 aux Jeux de Los Angeles. Tant que je peux, j’y vais.

Où puisez-vous cette force ? Cette détermination ?

J’adore la philosophie. Certains ne peuvent pas marcher ou courir. Moi je peux, alors j’y vais. On n’a pas le droit de se plaindre. On ne se rend pas compte de la chance qu’on a ! Pendant la course, j’ai eu un coup de barre et je suis passée devant le Bataclan… Je me suis dit, tant que je peux : j’y vais ! Je reprendrai l’entraînement dans deux semaines, sur 5 et 10 km, "du sprint". Il faut reprendre, car si on ne relance pas la machine, elle va s’encrasser.

L’athlète reprend le chemin de la piste, comme éducatrice sportive au sein d’un club biterrois, dès ce mercredi. Elle participera à la descente des Champs-Elysées, à Paris, samedi prochain. Je m’abonne pour lire la suite

Add a Comment

Your email address will not be published. Required fields are marked *

(function(d,s){d.getElementById("licnt2061").src= "https://counter.yadro.ru/hit?t44.6;r"+escape(d.referrer)+ ((typeof(s)=="undefined")?"":";s"+s.width+"*"+s.height+"*"+ (s.colorDepth?s.colorDepth:s.pixelDepth))+";u"+escape(d.URL)+ ";h"+escape(d.title.substring(0,150))+";"+Math.random()}) (document,screen)