Un requin pêché accidentellement au large de Palavas : “Il y en a beaucoup moins qu’avant”, selon le spécialiste Nicolas Ziani
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Après la capture accidentelle d’un requin-renard à Palavas-les-Flots, Nicolas Ziani, directeur scientifique du Groupe phocéen d’étude des requins (GPER) de Marseille, nous éclaire sur la présence des squales en Méditerranée.
Un requin-renard de quatre mètres s’est invité il y a quelques jours au premier Grand Prix de pêche de Palavas, organisé par le Team Thon Club Palavasien. Remonté accidentellement par un pêcheur à 10 miles au large, l’animal a ensuite été libéré avec précaution. Une prise qui rappelle que le requin est bien présent en Méditerranée, même si sa population est en déclin.
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Quelles espèces de squales peut-on trouver en Méditerranée ?
Le requin-renard et le requin peau bleue sont des espèces classiques, typiques des mers tempérées. Celui aperçu l’autre jour à Palavas était probablement un adulte. Ils peuvent atteindre jusqu’à 6 mètres, un peu plus grands que le requin bleu. On trouve aussi des anges de mer (un requin très plat souvent confondu avec les raies, NDLR), le mako et beaucoup de petits requins comme les saumonelles ou les émissoles.
Chez les espèces plus imposantes, le grand requin blanc est extrêmement rare. Il a pratiquement disparu. Le requin-pèlerin est aussi en déclin. Il faut savoir que 60 % des espèces vivent dans les profondeurs, dans les canyons océaniques près des Pyrénées.
Ils se sont habitués à la présence de l'être humain
Comment évolue la population de requins en Méditerranée ?
Il y en a beaucoup moins qu’avant. Par exemple, dans le cas du grand requin blanc, on estime qu’environ 700 individus étaient présents au Moyen-Âge, dont 40 % étaient concentrés dans le golfe du Lion. Depuis, on a perdu plus de 95 % de la population initiale. D’autres, comme le requin-renard ou le requin peau bleue, ont diminué de plus de 50 %. La plupart des espèces sont menacées d’extinction, avec le statut "en danger" de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), notamment les grands requins.
Les rencontres entre des plaisanciers et de requins deviennent-elles exceptionnelles ?
La présence de certaines espèces plus près des côtes est due au fait qu’elles se sont habituées à la proximité de l’être humain. Comme les ours ou les goélands, ils cherchent de la nourriture. Mais il y avait beaucoup plus d’interactions avant. Les requins sont devenus des créatures un peu mystiques car on a perdu le contact avec eux.
La plupart sont inoffensifs, il n’y a aucun danger
Quelle est la raison de ce déclin démographique ?
C’est principalement la pêche intensive, même si la capture connaît une tendance à la baisse. Il y a également beaucoup de prises accidentelles. Ça arrive souvent du côté de Sète, par exemple. Il faut toujours les relâcher, peu importe l’espèce, mais certains sont plus sensibles que d’autres, comme le grand blanc, le mako ou encore le renard.
Heureusement, la réglementation est de plus en plus stricte. La GFCM (la Commission générale des pêches pour la Méditerranée, NDLR) et la Convention de Barcelone encadrent la pêche en Méditerranée. Nous travaillons avec des pêcheurs engagés à réintroduire certaines espèces pour reconstruire les populations. Il existe des collaborations entre pêcheurs et scientifiques comme la Coopérative maritime du Levant.
Existe-t-il des risques pour l’être humain ?
Il n’y a presque aucun risque en réalité. Ce sont des espèces majoritairement piscivores. Le requin mako, par exemple, ne mange que des poissons. Le pèlerin se nourrit du plancton. Le requin-renard, qui vient chasser chaque été, mange des sardines. Le risque est plutôt sa longue queue, car il frappe avec elle. Mais il n’a pas des dents pour mordre, ce sont des dents d’un millimètre de hauteur. Les attaques datent du 15é siècle. La plupart sont inoffensifs, il n’y a aucun danger.
Les bons réflexes en cas d’interaction
Comme beaucoup d’autres animaux, les requins peuvent réagir de manière imprévisible lorsqu’ils sont nerveux, pour se défendre. En cas d’interaction, il faut éviter ou minimiser le contact autant que possible et sortir de l’eau. Pour signaler l’observation, vous pouvez contacter le GPER par téléphone au 06 50 41 38 47, par e-mail à phoceashark@gmail.com ou sur Facebook.
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