3157 € : c’est le coût de la rentrée pour des étudiants en précarité et “champions du triple-saut de repas !”

3157 € : c'est le coût de la rentrée pour des étudiants en précarité et "champions du triple-saut de repas !"

L’indicateur (source FAGE) recense l’évolution des dépenses auxquelles un étudiant doit faire face. FAGE – A. LLOP

Ils se proclament avec humour "champions du triple saut de repas". La rentrée s’annonce hurlante dans les estomacs des étudiants, pour qui l’alimentation n’est plus qu’une variable d’ajustement du budget.

Manger pour étudier… et vivre

Il faut manger pour étudier. Que ce diable d’Harpagon nous pardonne. La jeunesse aussi a besoin de quelque repas foisonnant pour vivre et mener à bien ses études. Il lui faut dormir 9 heures, se chauffer, être en sécurité, en forme et en bonne santé mentale. Mais à l’heure où tous les indicateurs convergent pour rendre compte de la précarité étudiante, le Crous observe un non-recours aux aides… Alors l’étudiant ? Précaire or not précaire ?

Révélée par la crise sanitaire, la part des étudiants précaires, autour de 25 % d’entre eux, constitue un fait structurel. La situation, en plus d’être stable depuis 2016, est loin d’être nouvelle. Tous les indicateurs le confirment, la précarité augmente. Et s’ancre. L’addition s’annonce salée pour les 270 214 étudiants de la région Occitanie qui comprend les 122 466 inscrits sur l’académie de Montpellier et 147 748 sur celle de Toulouse.

+ 1,2 % de boursiers dans l'académie de Montpellier

Selon le recteur délégué pour l’enseignement supérieur, Khaled Bouabdallah, "il n’y a pas de différences, que l’on soit étudiant à Toulouse ou à Montpellier", sauf une hausse du nombre des boursiers en 2024 de 2,5 % dans la première, soit 41 587 boursiers, et de 1,2 % dans la seconde, avec 37 328 boursiers.

La Fédération des associations générales étudiantes (Fage), lance un signal d’alarme : "Le coût de la rentrée atteint 3 157 €. Celle-ci s’annonce insurmontable pour tous, dont les étudiants non boursiers pour qui les frais d’inscription pèsent en moyenne pour 1 918 € dans leur budget", en hausse de 2,9 % pour la première fois depuis 2018.

L’Observatoire national de la vie étudiante (OVE) qui a publié son enquête triennale sur les conditions de vie des étudiants en 2023 confirme une précarité qui augmente avec l’âge : "16 % des 18-19 ans déclarent se retrouver démunis face à leurs besoins, 20 % chez les 22-23 ans, 30 % chez les 24-25 ans et jusqu’à 40 % chez les étudiants étrangers".

20 % des étudiants affamés

22 % des étudiants déclarent sauter souvent des repas. Parmi les raisons invoquées, 13 % s’y résignent, jusqu’à trois fois par semaine pour économiser du temps. Le tout saupoudré d’humour inspiré des derniers JO : "Champion de triple saut de repas" ou "chaque panier compte", émaillent les réseaux sociaux. Faut-il en rire ou en pleurer ?

Les initiatives pleuvent (bons d’achat, Restos du cœur, épicerie solidaire, etc.) pour que le saut de repas ne soit plus cette variable d’ajustement du budget, quand on sait qu’un étudiant sur 3 est en situation de découvert bancaire.

L’association COP1 propose des distributions de produits alimentaires et hygiéniques à Montpellier. "Ça fait un an et demi, explique Jade El Ayadi Gaouaou, vice-présidente. À chaque fois, c’est complet en dix minutes". 200 bénévoles donnent de leur temps pour leurs semblables. À Nîmes, une épicerie solidaire va prochainement ouvrir, en partenariat avec la Banque alimentaire du Gard, en plus de la distribution du Secours populaire.

Logement ultra-tendu

On réfléchit à deux fois avant de quitter le nid parental. 33 % des étudiants sont les cousins d’un certain Tanguy ! La grande majorité, 67 % est amenée à se tourner vers d’autres types de location, seul, en couple ou en colocation, face à l’insuffisance du parc du Crous. Les 11 020 logements de Toulouse et les 10 320 de Montpellier ne peuvent accueillir que 25 % des boursiers et 8 % des non-boursiers. 35 000 logements d’ici à 2027 à l’échelle nationale. Côté santé, on se dit globalement en forme, mais ceux qui ne peuvent bénéficier de l’appui de leur famille cumulent les fragilités. 41 % des étudiants d’origine sociale populaire présentent des signes de détresse psychologique, quand les mieux lotis socialement ne seraient concernés que pour 30 % d’entre eux.

Benoît Roig, président de Unîmes : “Le budget devrait être doublé, c’est simple !”

La rentrée du Campus de Mende, en collaboration avec l’université de Nîmes Unîmes que vous présidez est faite. Pourquoi ce choix ?

Le campus à Mende appartenait à Perpignan, mais elle ne pouvait plus assurer le portage de cette antenne, avec ses 17 autres sites délocalisés. C’était aussi le plus éloigné. Notre intention est de mailler le territoire, afin de proposer de l’enseignement supérieur dans de tels territoires. De plus, nos formations sont complémentaires à celles de Nîmes, avec le tourisme et la communication en licence.

À partir de quels partenariats cette reprise a-t-elle pu se faire ?

J’ai rencontré les collectivités locales qui de leur côté étaient très à l’écoute. Reprendre cette antenne n’a pu se faire que dans cet esprit, nos formations devaient s’inscrire dans les besoins territoriaux, et avec l’appui du monde professionnel. Désormais, les formations vont du BTS, la faculté d’éducation, les formations d’infirmiers aux licences pros et masters.

Pour combien d’étudiants ?

Le nouveau campus de l’université, c’est une centaine d’étudiants en licences professionnelles en communication, tourisme, et deux années masters en tourisme.

Une opportunité qui privilégie l’accès aux études pour tous ?

La stratégie du maillage doit bénéficier à des jeunes qui n’ont pas la possibilité d’étudier loin de chez eux, ou défavorisés.

Sur la question de la précarité, qu’en est-il de Nîmes ?

Nous avons 6 000 étudiants. La rentrée s’est bien passée mais le Gard est un département défavorisé, avec au moins 50 % d’étudiants boursiers, un chiffre de 10 % supérieur à la moyenne nationale.

Quels sont les dispositifs d’aide ?

En octobre, une épicerie solidaire ouvrira sur le campus. Nous avons déjà de la distribution alimentaire grâce au Secours Populaire, on prête aussi des vélos et nous avons des distributeurs de produits d’hygiène gratuits. Nous avons organisé un job dating avec des entreprises enclines à s’adapter à l’emploi du temps des étudiants. Une vingtaine d’entreprises en lien avec France Travail ont réalisé plus de 600 entretiens sur place, avec des postes dans la restauration, l’administration, le commerce, l’éducation…. Étudier et travailler, c’est lourd mais au moins, nous apportons une solution concrète.

S’agissant de la santé ?

Notre site est labellisé Maison Sports Santé Universitaire. Cela signifie que l’on peut faire du sport sur ordonnance et que des médecins peuvent prescrire des séances pour des pathologies. Notre service met par ailleurs en place des ateliers de méditation, yoga, relaxation…

Unîmes, avec un faible taux d’encadrement, est-il le parent pauvre des universités ?

Notre taux d’encadrement est de 4,5, soit 50 % inférieur au taux national. On a été créés en 2007, puis implantés définitivement en 2012. À l’époque il y avait 1 200 étudiants. Aujourd’hui 6 000. Les moyens humains n’ont pas suivi car la progression a été fulgurante.

Qu’attendez-vous du prochain ministre de l’Éducation ?

Notre budget devrait être doublé, c’est simple. J’attends au moins qu’on l’augmente de manière modérée. C’est conjoncturel, ce n’est pas par négligence si nous en sommes là, mais j’espère être entendu Je sais qu’elle l’est par le recteur délégué, avec qui nous en parlons souvent.

En quoi les campus connectés sont-ils essentiels ?

Les campus connectés ont nécessité d’avoir une université partenaire qui les soutient. Celui d’Alès est en cours, mais ceux de Mende et du Vigan sont accessibles dès le Bac de manière à pouvoir poursuivre sur un site universitaire. Ils attirent des étudiants en précarité sociale, physique, ou ne pouvant se déplacer. Au Vigan, il y en a une trentaine. Ouvert en 1999, à titre expérimental, le dispositif donne satisfaction aussi pour ceux qui sont en reprise d’études, en reconversion. Le secret réside dans leurs tuteurs, au Vigan les deux tuteurs sont très impliqués, comme à Mende où cela existe depuis 2021.

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