DOSSIER. Dans les anciennes mines cévenoles, se cachent des métaux critiques de la transition énergétique

DOSSIER. Dans les anciennes mines cévenoles, se cachent des métaux critiques de la transition énergétique

Bénédicte Cenki travaille avec ses élèves de l’Université de Montpellier. Avec certains, elle effectue de l’échantillonnage sur les sites miniers cévenols. Midi Libre – MICHAEL ESDOURRUBAILH

La géologue Bénédicte Cenki, de l'Université Montpellier, s’intéresse aux métaux critiques liés au plomb et au zinc longtemps exploités dans les Cévennes et en Lozère. Des métaux critiques auxquels on ne s'intéressait pas il y a encore vingt ans.

Ce jeudi-là, dans une halle technique de la faculté des sciences de l’Université Montpellier, il y a Tess, Milena, Colin, Jérémy et Nolan, penchés vers l’écran, détaillant les données de l’analyse par microsonde de l’échantillon de roche qu’ils ont réalisée. Une fine tranche, à peine 30 microns, traversée par un faisceau électrique. "Il interagit avec la matière et donne un signal spécifique par élément chimique, que l’on va pouvoir quantifier, explique leur enseignante, Bénédicte Cenki. D’un simple regard, on ne peut pas dire si tel échantillon contient un métal critique ou pas", la concentration peut n’être que de quelques PPM, des parties par millions, à l’échelle microscopique, ou en "pépites", comme dans un gâteau.

Ce "caillou", l’enseignante-chercheuse du laboratoire de géosciences l’a collecté sur le mont Lozère, dans une galerie de mine désaffectée dont le sud du Massif central recèle tout "un chapelet". Des mines de plomb et de zinc, historiquement exploitées, aujourd’hui abandonnées, où l’on "ne cherchait pas, il y a encore vingt ans", des métaux aujourd’hui précieux, qualifiés de critiques en Europe occidentale, en regard de sources d’approvisionnement fragiles.

DOSSIER. Dans les anciennes mines cévenoles, se cachent des métaux critiques de la transition énergétique

L’analyse des échantillons par microsonde permet d’isoler la présence éventuelle de métaux. Midi Libre – MICHAEL ESDOURRUBAILH

De la collecte sur sites

Or, "les éléments chimiques se mettent par affinités, glisse Bénédicte. On ne trouvera pas de nickel dans d’anciennes mines de zinc ou de plomb", mais on peut y croiser de "l’indium, du germanium et du gallium". Le premier est beaucoup employé dans la digitalisation, "pour les écrans tactiles", le gallium dans la fabrication de panneaux photovoltaïques et le germanium pour les catalyseurs, les fibres optiques, par exemple.

Ces métaux sont au centre des transitions numérique et énergétique. Et le réseau d’anciens gisements de zinc et de plomb, de la Lozère à l’Ardèche, via les Malines, à Saint-Laurent-le-Minier, ou La Croix-de-Pallières à Anduze, dans le Gard, est intéressant à fouiller. D’abord, souligne Bénédicte Cenki, "parce que ce sont des zones déjà travaillées par l’homme" et pas un terrain vierge. Ensuite, car les déchets miniers, ces résidus de l’extraction initiale du plomb ou du zinc, se comptent en millions de tonnes, des terrils, "des vallons entiers, à Saint-Laurent", à valoriser, réhabiliter avant peut-être d’encore creuser le sol.

Les travaux de recherche de la scientifique montpelliéraine ont trouvé leur place dans le PEPR Sous-sol bien commun, pour lequel elle montera vers la Haute-Loire. L’idée est, avec un postdoctorant et ses étudiants de licence 3, de "s’intéresser au mode de formation primaire de ces métaux critiques" et dresser une cartographie de l’éventuelle présence de gallium, germanium, indium, par la collecte dans les sites miniers et l’étude des échantillons.

Une cartographie de la présence de gallium, germanium, indium

Mais la géologue a en parallèle convaincu l’ANR, l’Agence nationale de la recherche, de lui allouer un financement pour un projet connexe baptisé Critical metals in orogens. Elle se penchera cette fois sur les "processus secondaires, c’est-à-dire les modifications postérieures à la formation primaire des métaux critiques", dont elle pense que leur formation "diffère des métaux de base".

Cette "approche innovante, qui pourrait changer la méthodologie d’exploration et d’exploitation" des mineraux critiques, a permis à Bénédicte Cenki d’obtenir 750 000 € de l’ANR.

Le projet a débuté en mars.

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