Haut-Languedoc : les touristes, c’est bien, les résidents, c’est mieux

Haut-Languedoc : les touristes, c’est bien, les résidents, c’est mieux

L’école de Fraïsse-sur-Agout pourrait, à la rentrée, perdre l’une de ses deux classes. AJ – ML

Plus de résidents, moins de touristes, c’est le choix politique qui semble désormais s’imposer aux petites communes de l’arrière-pays biterrois, qui ont plus, voire beaucoup plus, de maisons secondaires que de logements occupés à l’année. Jim Ronez, le maire de Fraïsse-sur-Agout, tire la sonnette d’alarme.

Selon les derniers chiffres de l’Insee, 70 % des logements de Cambon-et-Salvergues, dans l’arrière-pays biterrois, sont des maisons secondaires. On pourrait se dire qu’il ne s’agit que d’un épiphénomène n’affectant qu’une toute petite commune qui affiche à peine une cinquantaine d’habitants.

Sauf que cette problématique touche aussi les villages voisins, notamment les communes héraultaises de la communauté de communes des monts de Lacaune et de la montagne du Haut-Languedoc : 67 % pour Le Soulié ; 43 % Rosis ; 46,6 % Castanet-le-Haut ; 64 % La Salvetat-sur-Agout ; 58 % Fraïsse-sur-Agout.

"On arrive au bout de cette politique d’accueil touristique"

Pour Jim Ronez, le maire de cette dernière commune, "c’en est trop. On arrive au bout de cette politique d’accueil touristique que nous avons menée pendant plus de cinquante ans." Il poursuit, rappelant cependant que le tourisme a apporté de l’activité et de la richesse à la commune et aux habitants.

"Pendant des années, la commune a mis en avant ses atouts touristiques, œuvrant pour les promouvoir, pour attirer les visiteurs, avec, entre autres, la construction d’un Campotel et de gîtes touristiques municipaux, l’aménagement d’un parcours de pêche, l’obtention de divers labels (station verte, village fleuri…). Ces atouts ont engendré des projets privés : l’auberge de l’Espinouse, des campings, le Gaec Fontanelle… Le résidentiel secondaire s’est développé grandement avec cet accueil très favorable."

Puis le ton de Jim Ronez change. "Mais tout cela s’est fait au détriment du développement de la capacité d’accueil à l’année." Et d’indiquer qu’aujourd’hui, à Fraïsse, il n’y a plus rien à louer ni à vendre. Et les conséquences négatives commencent à surgir.

Il y a trois ans, l’école comptait 34 élèves pour deux classes. "Cette année, avec 23 enfants, on a pu maintenir les deux classes. Mais à la rentrée prochaine, il n’y aura que 17 élèves. Si c’est confirmé, nous fermons une classe et perdons un poste d’instit."

Certes, le nombre d’habitants se maintient depuis des années, "mais ils vieillissent, les naissances sont de plus en plus rares." Pour l’instant, la commune a son bureau de poste, un cabinet médical, une bibliothèque… "Mais jusqu’à quand ?"

Le maire et son équipe ont donc décidé de travailler sur le logement, sur la capacité d’accueil à l’année. "D’autant que nous avons régulièrement des candidats à l’installation mais nous ne pouvons pas répondre à leur demande. Ils cherchent, ne trouvent pas, et vont ailleurs." Ainsi, la mairie travaille à la fois sur du court et du moyen termes, notamment dans le cadre du programme Village d’avenir auquel elle adhère. Le Campotel et ses 12 appartements, pour l’instant fermés, et les six gîtes attenants n’accueilleront plus de touristes mais vont être rénovés pour de la location à l’année. "Nous sommes en train d’acheter une maison pour y proposer deux appartements à la location."

La mairie, avec l’aide du Pôle d’équilibre territorial rural, de la communauté de communes et de l’Établissement public foncier a commencé à démarcher les propriétaires de logements vacants et résidences secondaires pour les encourager à vendre ou à louer. Et ce n’est qu’un début.

Rosis, Le Soulié, Castanet-le-Haut confrontées au même problème

Anne-Lise Sauterel, maire de Rosis : " Nous vivons cette crise du logement nous aussi. Nous avons beaucoup de logements vides, des résidences secondaires (43 %) qui ne sont ni habitées, ni louées alors que nous avons une forte demande à l’année. La mairie, elle, n’est propriétaire que de deux gîtes touristiques, de deux appartements loués à l’année et d’une maison, en cours de rénovation, pour être louée à l’année. Quant au foncier non bâti, nos terres ne sont pas constructibles, loi Montagne oblige. Bref, difficile de faire venir du monde. Nous sommes d’ailleurs en pleine réflexion pour acquérir des biens – en ruine et insalubres – appartenant à des privés pour y mener des travaux. Si on fait partie des “Villages d’avenir”, c’est justement pour trouver des pistes en ce sens."

Pierre Bailly, Le Soulié : "Nous vivons les mêmes problématiques que Fraïsse : il faut trouver des solutions pour retenir les résidents et en faire venir d’autres si l’on ne veut pas disparaître. Pour l’instant, on se maintient. Depuis le Covid, j’ai aussi une population nouvelle qui est arrivée, avec peu de moyens, qui vit dans des logements illégaux. Mais on n’a rien à proposer. Nous ne possédons que deux logements qui sont loués à l’année, contrairement à Fraïsse. Alors, nous avons décidé de travailler plutôt sur la production d’énergie photovoltaïque pour tenter d’être producteur et consommateur de notre propre énergie sur les bâti² ments municipaux."

Max Alliès, Castanet-le-Haut : "J’ai la chance d’avoir plus de recul que mes homologues voisins puisqu’il s’agit de mon 8e mandat. Ce qui m’a permis d’agir. Ça fait très longtemps que je vois que nos communes perdent de leur population à l’année.Oui, nous avons connu l’exode rural, puis beaucoup de maisons ont été achetées, à l’époque à bas prix, par des urbains de la région pour en faire leur résidence secondaire. Nous sommes à 46,6 % de résidences secondaires. De plus, notre patrimoine bâti a été très prisé par les étrangers. Comme nous sommes dans une zone très touristique, nous avons à la fois restauré tout notre patrimoine religieux, naturel, nos tronçons de chemin de Compostelle, etc. pour accueillir les touristes, et mené une politique d’achat et de rénovation de l’habitat ancien. La commune est propriétaire d’une trentaine de bâtiments aujourd’hui, restaurés et loués à l’année. Mais il n’y a pas que le logement. On s’est aussi battu avec le Département pour lutter contre la fracture numérique (téléphone, internet…), ce qui a permis de nouvelles installations de personnes pouvant faire du télétravail. Et nous avons adhéré aux “Villages d’avenir”, pour pouvoir nous substituer aux bailleurs sociaux qui investissent très peu sur nos territoires. Bref, en 25 ans, le nombre d’habitant est passé de 144 à environ 200."

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