Marion Welch, éleveuse de bovins et porcins à Fraïsse-sur-Agoût, dans l’arrière-pays de Béziers, expérimente l’Abat’Mobile

Marion Welch, éleveuse de bovins et porcins à Fraïsse-sur-Agoût, dans l'arrière-pays de Béziers, expérimente l’Abat’Mobile

Marion Welch élève 130 bovins et 250 porcins à Fraïsse-sur-Agoût. Sarah Desteuque – ML

Marion Welch, éleveuse de bovins et porcins à Fraïsse-sur-Agoût, dans l'arrière-pays de Béziers, expérimente l’Abat’Mobile

L’Abat’Mobile a testé l’abattage pour la première fois le 2 juillet dernier. Sarah Desteuque – ML

Marion Welch, éleveuse de bovins et porcins à Fraïsse-sur-Agoût, dans l'arrière-pays de Béziers, expérimente l’Abat’Mobile

Marion Welch, éleveuse de bovins et porcins à Fraïsse-sur-Agoût, dans l'arrière-pays de Béziers, expérimente l’Abat’Mobile

Emilie Dequiedt AJ – ML

Une quarantaine d’éleveurs de l’arrière-pays biterrois se sont regroupés pour fabriquer et expérimenter un caisson d’abattage à domicile nommé Abat’Mobile.

On se souvient tous des manifestations des agriculteurs, en janvier dernier, qui dénonçaient des revenus à la baisse, des trésoreries vides, des banques qui ne suivent pas, des normes environnementales différentes en Europe, d’un pays à l’autre, le coût de la vie qui ne cesse d’augmenter… Bref, un désarroi, souvent invisible, qui a poussé vignerons, éleveurs, céréaliers, maraîchers… à crier leur colère à coups d’opérations escargot sur l’autoroute et autres actions de mécontentement. Oui, les “travailleurs pauvres” sont aussi nos agriculteurs. Alors comment vivre décemment de son travail de paysan aujourd’hui ? Est-ce possible sans être l’héritier de terres et d’outils agricoles ?

Certains y sont parvenus. Comment ? Le plus souvent en multipliant et/ou mutualisant les solutions, en se diversifiant. Si beaucoup ouvrent des gîtes, comme les éleveurs de La Couvertoirade, d’autres initiatives existent. Comme à Fraïsse-sur-Agoût, chez l’éleveuse de bovins et porcins Marion Welch. Elle fait partie de la quarantaine d’éleveurs en bio du nord de l’Hérault à avoir construit ensemble un “Abat’Mobile”, un caisson d’abattage. 

Le 2 juillet, l’Abat’Mobile, caisson d’abattage à domicile (allant de ferme en ferme) construit et expérimenté par une quarantaine d’éleveurs du nord de l’Hérault, envoyait son premier animal dans l’au-delà. Le rendez-vous avait été fixé par l’association Abat’Mobile 34, présidée par Émilie Dequiedt, du groupement agricole d’exploitation en commun (Gaec) “La part du loup”, à Avène (qui élève des brebis et fabrique du fromage), sur l’exploitation de Pierre Bodot et Sophie Rambaud, éleveurs à La Couvertoirade, au Caylar. Un veau devait y être abattu.

Un premier test réussi

"Il s’agissait d’un test pour savoir si le caisson fonctionnait, pour voir si des réglages étaient à faire, et observer comment les animaux se comportent", expliquaient Émilie et Basile Dequiedt. D’autres tests sont à venir.

Le 9 juillet, ce sera au tour de Marion Welch, éleveuse de bovins – des vaches et des bœufs – et de porcins – du porc noir rustique corse, gascon et autres terroirs à Fraïsse-sur-Agoût, dans l’arrière-pays biterrois. Elle fera passer les essais à l’un de ses 130 bœufs.

Agricultrice depuis 2009 dans l’élevage extensif de bovins en pastoralisme, sur des landes tourbières, elle se monte en Gaec (nommé Les hautes landes) avec son père au lieu-dit La Sagne, en 2016. Aujourd’hui, Marion Welch s’apprête à se monter en exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL). Elle élève également 250 porcs en plein air, sur 15 hectares.

Alimentation : des “sous-produits” pour économiser

"Concernant l’alimentation de mes vaches, comme elles pâturent, je n’ai besoin que de très peu de compléments. En revanche, pour mes cochons, ce n’est pas pareil ", précise Marion Welch. 250 cochons, ça en fait des bouches à nourrir.

L’éleveuse poursuit : "L’élevage bio de porcins en plein air est très difficile économiquement, fait remarquer Marion Welch. Il faut savoir que le tarif 2023 de l’alimentation de base, c’est 650 € la tonne. Moi, j’ai besoin d’une tonne tous les trois jours… Vous imaginez bien qu’économiquement, ce n’est pas viable."

Ainsi, l’éleveuse a trouvé une solution : la récupération ou l’achat de “sous-produits” biologiques. Tout d’abord, elle récupère les déchets de triage de semences des céréaliers bio de la Scic Graines équitables, dont elle est adhérente et cogérante.Marion Welch achète également de “co-produits” à l’usine Bio sud d’Arles (farine de riz, son de riz, riz vert et écarts de riz). "Je récupère aussi les drêches (les résidus) de la distillerie artisanale Bows, à Laure-Minervois, dans l’Aude."

Mutualiser l’abattage

L’idée de l’Abat’Mobile naît vers 2018. Tout est parti de la loi Egalim qui poursuit plusieurs objectifs : entre autres, celui de rémunérer justement les producteurs, pour leur permettre de vivre dignement de leur travail. "Elle a permis la création d’un cadre réglementaire pour monter des projets d’expérimentation", explique l’éleveuse. Elle poursuit : "Il faut savoir que les éleveurs du Biterrois amènent les bêtes à l’abattoir de Pézenas ou des départements voisins. Il n’y a pas d’autres solutions. Moi, depuis Fraïsse, c’est deux heures de route, avec des bovins qui n’ont pas l’habitude d’être transportés et enfermés. Puis, il y a l’attende d’une nuit avant l’abattage. Il fallait changer tout ça, pour le bien-être animal tout d’abord, mais aussi pour nous. Car le temps que nous ne passerons pas à la préparation des bêtes, sur la route et à l’abattoir, c’est du temps gagné pour faire autre chose."

D’où l’idée, comme pour les unités d’embouteillage mobile pour les vignerons, d’un caisson d’abattage à domicile pour tous les adhérents. "Une quarantaine d’éleveurs – bovins, caprins, ovins et porcins – , la grande majorité en bio participent à cette aventure, sous l’égide de l’association Abat’Mobile 34. Le projet a été monté en partenariat avec l’institut national de la recherche agronomique (Inrae), et l’abattoir de Pézeans. Il fallait concevoir un outil conforme à la réglementation européenne. Nous avons, pour cela, été soutenus par différents organismes, dont la confédération paysanne, la Région, la fondation de France, les fonds européens, et par Hamelle création, à Lodève pour la réalisation du caisson."

Une cagnotte participative, avec contrepartie, a été lancée sur Internet, ce qui les a aidés dans toutes leurs études et démarches, ainsi qu’au financement du caisson. L’association a passé une convention avec un éleveur tâcheron, Xavier Tonnabel, qui s’occupera de l’abattage, aidé de l’éleveur utilisateur du caisson. Le projet en est, aujourd’hui, au stade de l’expérimentation.

Le choix du Gaec et de la vente directe pour Émilie et Basile Dequiedt

Avant 2015, Émilie Dequiedt et son époux Basile, installés depuis 2007 au lieu-dit Les Planes, à Avène, en groupement agricole d’exploitation en commun (Gaec), La Part du loup, ne trayaient leurs 200 brebis que pour vendre leur lait à Lactalis.

"Nous avions choisi ce type de montage sociétaire d’abord parce qu’il permettait que chacun de nous deux ait un statut, pour ne pas être "la femme de" ou "le mari de". Pour aussi mutualiser le matériel (faucheuses, presse, plateau fourrager…), du matériel très coûteux. Enfin le Gaec nous permettait aussi de faire rentrer facilement des associés pouvant participer au travail ou entrer dans le capital comme agriculteur. Nous sommes toujours en Gaec et tout marche."

En revanche, le couple ne parvenait pas à vivre de la vente de son lait au grand groupe laitier. "C’était très difficile. Alors, nous avons décidé d’arrêter et de faire uniquement de la vente directe. Avec l’aide de la Région, du Département et du Civam Bio (pour la conversion en bio), nous sommes parvenus, dès 2015, à monter et financer notre laboratoire de transformation pour la fabrication de nos fromages et de nos glaces."

Aujourd’hui, Émilie et Basile Dequiedt ne regrettent pas leurs choix.

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