Un ancien légionnaire du 1er Reg devenu peintre officiel de l’armée française expose à Bagnols-sur-Cèze, “je fais le plus beau métier du monde”
|Paul Anastasiu passe ses journées à peindre dans son atelier aménagé à l’étage de sa maison. Midi Libre – Chloé Lopez
Ce portrait de Johnny Hallyday est exposé à la boutique Bise’Arts à Bagnols-sur-Cèze. Midi Libre
Le tableau “Au cœur de l’action” réalisé pour le chef de corps des pompiers de Paris qui avait dirigé les manœuvres d’intervention sur Notre Dame de Paris en 2019. Midi Libre
Paul Anastasiu, ancien caporal-chef au 1er régiment étranger de génie à Laudun-l'Ardoise, s'est lancé pleinement dans la peinture après 15 ans à la Légion étrangère.
Paul Anastasiu a intégré la Légion étrangère en 1991, alors âgé de 19 ans et demi. Grâce à sa troisième place à la fin de sa période d'instruction, l'homme originaire de Roumanie a choisi de rejoindre la 13e DBLE (demi-brigade de légion étrangère) implantée, à l'époque, à Djibouti. Trois ans plus tard, il intègre le 6e régiment étranger de génie à Laudun-l'Ardoise, devenu en 1999 le 1er Reg.
À la Légion, il n'a jamais dépassé le grade de militaire de rang. Son projet, ce n'était pas de faire une longue carrière chez les képis blancs mais plutôt de peindre. Cette passion, il l'a développée quand il était enfant grâce à son père, professeur d'arts plastiques. "J'ai commencé à faire du graphisme et de la sculpture", indique l'ancien caporal-chef qui a réalisé lui-même l'insigne du 1er Reg.
"La peinture, c'est devenu vital"
À la Légion, dès qu'il le pouvait, il posait les armes pour prendre les pinceaux. "Mes camarades m'encourageaient à peindre. Ça sortait un peu de l'ordinaire. Je faisais des toiles pour le régiment." "C'est un enfant du 1er Reg. Il a toujours eu cette touche artistique même quand il bricolait au quartier", témoigne le commandant Olar qui a connu l'artiste dans les années 2000 au quartier général Rollet.
En 2005, Paul Anastasiu est nommé peintre officiel de l'armée française. Un an plus tard, il prend sa retraite après 15 ans et demi de service. L'occasion pour lui de s'investir pleinement dans sa passion devenue aujourd'hui son métier. "Je me répète souvent que je fais le plus beau métier du monde. La peinture, c'est devenu vital pour moi. Je ne me vois pas faire autre chose."
La technique du couteau
Chez lui, une dizaine de réalisations égayent les murs blancs de son salon. Des escaliers, plutôt étroits, mènent à son atelier, là où l'ancien légionnaire passe ses journées. Des centaines de chiffons et de tubes de peintures s'entassent sur le sol. Sur une table basse en guise de palette, de la peinture, plus ou moins fraîche, est amassée dans un arc-en-ciel de couleurs. Un atelier aux antipodes de la rigueur et la discipline exigées à la Légion. Des toiles, en train de sécher, décorent les murs. "Je prends d'abord des pinceaux larges pour commencer et faire un travail de fond. Avec un pinceau plat, je fais le contour du sujet mais 80% du travail c'est le couteau." Pour cet artiste, la peinture à l'huile est "la matière reine".
Une toile de 8 mètres sur Marseille
Les sujets de ses œuvres varient. Il peut aussi bien peindre le portrait d'une femme complètement imaginée que celui de Lionel Messi ou Johnny Hallyday. "Sur certains, j'écris des choses en lien avec le sujet. Comme j'écoute de la musique quand je travaille, il peut y avoir des paroles aussi." Sa plus grande réalisation ? Une toile de 8 mètres, intitulée "La Marseillaise", peinte en 2016 pour le fort de Marseille. La même année, il réalise une commande pour les pompiers de Paris, "Toujours plus haut".
En 2020, il peint une "collection particulière" nommée "Au cœur de l'action" pour le chef de corps des pompiers de Paris qui a dirigé les manœuvres d'intervention sur Notre-Dame de Paris. Sur le tableau, on voit la cathédrale brûler pendant que les soldats du feu déploient les lances.
Des prix décernés par l'armée
Paul Anastasiu obtient le prix du ministre des Armées en 2022 pour son tableau "Rencontre avec Hubert Germain", dernier des compagnons de la Libération. Le prix de l'armée lui a été décerné en 2019 par le chef d'état-major de l'armée de Terre pour son œuvre "Le Coeur de l'Âme".
S'il a obtenu plus de prix et de médailles artistiques que de décorations militaires, il n'oublie pas ses années de légionnaire. "Il est parti depuis longtemps mais on sent qu'il a le régiment dans son cœur. C'est un peu son accroche", ajoute le commandant Olar. De nombreuses toiles mais aussi des sculptures réalisées par ses soins habillent la salle d'honneur du 1er Reg. Un tableau de la bataille de Camerone, considérée comme "l'acte fondateur de l'esprit Légion", repose dans le bureau du général à Aubagne. Honneur et fidélité jusqu'au bout du pinceau.
Paul Anastasiu expose une quinzaine de tableaux à la boutique Bise'Arts (10 rue de l'Horloge à Bagnols) jusqu'au 2 mars. Je m’abonne pour lire la suite