“Il n’y aura pas de collège à Grabels” : face à la grogne des parents contre la carte scolaire, Renaud Calvat défend le collège des Garrigues
|Le Collège des Garrigues dans les Hauts de Massane victime de son implantation au “cœur d’un quartier sensible”, selon les parents d’élèves. – DR
Les parents d'élèves de la commune de Grabels et des Haut de Massane se mobilisent autour d'un projet pour un collège à Grabels. Les Grabellois et certaines familles des Hauts de Massane fuient l’établissement de référence de la carte scolaire, le collège Les Garrigues. Les raisons de cet évitement sont le manque de mixité sociale, l'insécurité ainsi que ses résultats. Pourtant loin d'être mauvais.
Les collèges ont des compositions sociales diversifiées. Est-ce un facteur qui permet de renforcer les inégalités scolaires ? La réponse est un "oui' mitigé pour ces parents d'élèves inscrits au collège des Garrigues des Hauts de Massane, réunis en soirée dans un local du comité de quartier "pour échanger que l'on soit de Massane ou de Grabels", explique l'une d'entre eux, Céline Bancarel. Car ces deux secteurs se partagent la même carte scolaire.
Le mythe de la mixité
C'est un fait, la mixité ne réduit en rien les inégalités de réussite scolaire. Des évaluations nationales montrent que cela ne fait pas bouger le niveau d'apprentissage. L'environnement permet certes, aux élèves de mieux réussir, mais tout dépend du climat qui y règne. Et c'est un sentiment d’insécurité qui s’est clairement ancré ici.
Collège et quartier souffriraient-ils d'un délit de sale gueule ? Chacun s'accorde à dire "que le quartier n'est pas mal, avec des espaces verts comme nulle part ailleurs" et que la mixité offre peut-être une meilleure cohésion sociale, "mais à quel prix !". Le tableau n'est pas terrible : "Une des difficultés majeures reste le lieu, au milieu d’un quartier sensible et connu pour les spots de drogue aux alentours".
Une fuite des jeunes cerveaux vers le privé et hors carte scolaire
Plus l'indice de position sociale (IPS) est élevé, plus on estime que l'élève évolue dans un contexte familial favorable à sa réussite (lire ci-dessous).
Avec un IPS de 73 % associé au collège, considéré comme faible, le constat de la fuite des élèves grabellois vers le public, "en trichant sur son lieu de résidence", et le privé pour les plus aisés, n’est pas pour rassurer les parents, pour qui la construction d’un nouvel établissement à Grabels serait une panacée, adossée à une carte scolaire, "sinon, toujours pas de mixité ! Le nombre d’enfants grabellois est suffisant pour ouvrir un collège et la population a une démographie en croissance constante de 2,6 % en moyenne par an. Et elle rajeunit ce qui appelle la création de nouveaux quartiers comme les Gimels et ses 800 logements à l’horizon 2027", rappelle Solenne Rougier, parente d’élève.
Ce qui n’est pas de l’avis de Renaud Calvat, vice-président délégué à l’éducation et aux collèges au Département, et de la sectorisation (lire ci-dessous).
"Le maire René Revol propose un terrain à Grabels", résout Solenne. Mais à 400 mètres à vol d'oiseau de Massane, non seulement "c'est illogique" pour Renaud Calvat, "mais pour une zone d’affectation, il faut au moins 10 000 habitants". Loin des 8000 actuels, "il n'est prévu aucune construction nouvelle".
Pas de construction dans les 15 années à venir
L’évolution démographique ne justifierait d'ailleurs pas la construction d’un collège dans le grand Montpellier dans les 15 ans qui viennent !
Les Garrigues ne comptent d'ailleurs que 580 inscrits pour 700 places et seuls 550 élèves sont prévus sur l'an prochain. "Normal, c'est une REP+", simplifie le vice-président. "Non, en fait, seulement 20 % des élèves de la commune de Grabels sont inscrits au collège de secteur, les 80 % autres dérogent !", rectifie Céline Bancarel.
Racistes ? Nous ?
Pour les parents, les comptes n'y sont pas, tout est affaire de proportions : "On nous taxe de racistes, mais c'est faux !", soulève Solenne Rougier. On marche sur des œufs, on en écrase quelques-uns au passage.
"On veut le meilleur pour nos enfants. Mais qu’est-ce que cela sous-entend ? L’équipe est formidable aux Garrigues, et le quartier n’est pas sensible", souffle Renaud Calvat.
Les résultats d’une scolarité pourtant loin d’être mauvais
Le collège Les Garrigues accueille 604 élèves dont 138 élèves de troisième.
En fin de troisième, selon les résultats obtenus au DNB (Diplôme National du Brevet), 79 % des collégiens du Collège ont acquis le niveau de compétences et de connaissances requises, quant au taux de réussite sur 3 ans, il est de 81,2 %. La moyenne à l’écrit du DNB s’est située à 9,7 (13.1 pour Clémence Royer, 9.9 pour Clémenceau…).
L’Étudiant le classe même en 6e position des meilleurs collèges publics de la Ville, derrière Joffre ! On considère que le niveau de compétences y est supérieur à la moyenne exigée, compte tenu des attendus. Plus l’indice de position sociale (IPS) est élevé, plus on estime que l’élève évolue dans un contexte familial favorable à sa réussite scolaire. Avec un IPS de 73 % (110 % pour le collège Joffre et 142 pour le collège privé De la Salle), il accueille un public de catégorie sociale inférieure à la moyenne nationale.
En fin de troisième, 78 % des 138 collégiens ont pour leur part acquis une mention à la fin de leur cursus. Ces résultats classent le Collège les Garrigues, en 2024, 3 512e collège au niveau national sur les 7 209 de l’Hexagone. Et lui confère une très honorable 14e place sur les 23 collèges de Montpellier. Loin, certes des résultats du légendaire collège Joffre, placé à la 182e place au niveau national, et dont 88 % des élèves de 3e sont sortis lauréats du DNB. Le collège des Garrigues a gagné 1 748 places par rapport à 2022 au classement des meilleurs collèges de Montpellier, pourcentage de mentions en hausse au brevet sur un an, y compris.
"À Saint-Gély-du-Fesc, le taux de réussite au brevet est de 98 %". Une remarque qui pique les oreilles du vice-président pour qui ce taux est à replacer dans son contexte. "Ce n’est pas lié au niveau du collège, c’est affreux pour les professeurs de penser ça".
Et Solenne d’insister, "le brevet est noté différemment". Il serait "de moins bonne qualité, les élèves arrivent en seconde sans en avoir le niveau". Des travaux de rénovation sur le préau, le plateau sportif et les salles de classe sont ou seront à l’œuvre, grâce à l’enveloppe de 13 M€ votée à l’automne. Les parents cherchent le dialogue, "pour trouver la solution ensemble et avoir l’adhésion des Grabellois. On n’a jamais été consultés".
L’investissement financier peut-il venir à bout des inquiétudes et du "sentiment d’insécurité". Rien n’est moins sûr dans le nord de Montpellier.
Une réunion publique se tient le 21 mars à la Maison Commune de Grabels afin que "les parents d’élèves puissent être écoutés et entendus".
Renaud Calvat, vice-président au Département : “Je recevrai les délégations”
Vous rendrez-vous à la réunion publique à Grabels ?
Je ne m’y rendrai pas mais je recevrai les délégations de parents, si cela est souhaité.
Un collège peut-il voir le jour à terme à Grabels, avec une carte scolaire associée ?
Cela me rappelle Las Cazes, devenu par la suite Simone Veil. À l’époque quand on tapait le nom sur internet, il n’y avait que des items négatifs. En changeant de nom et de projet, aujourd’hui on parle de classes bilingues, de sport études, etc. Seulement 280 élèves y étaient inscrits, alors que la capacité était de 650. On préférait déroger à la carte scolaire, ou aller dans le privé. Aujourd’hui on est à 680 élèves, grâce à la section internationale et à la section rugby. La mixité s’est faite. Et puis c’est illogique de faire un nouveau collège aux portes des Hauts de Massane. Pour une zone d’affectation, il faut au moins 10 000 habitants, ce qui n’est pas le cas de Grabels.
Les conditions ne sont donc pas réunies ?
Il y a trois leviers. Le premier est d’agrandir, mais aux Garrigues, il y a moins d’élèves que la capacité maximale. Le deuxième, est la modification de la carte scolaire en cas de saturation. La troisième est la construction, comme à Port Marianne et Juvignac. Aucune de ces situations ne correspond à ce collège. Des investissements vont être réalisés. Et des options pourraient voir le jour, de manière à rendre le collège plus attractif.
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