“J’aurai aimé un signe du pole de Montpellier, un coup de fil du nouvel entraîneur” : le combat Kenza Chaal

"J’aurai aimé un signe du pole de Montpellier, un coup de fil du nouvel entraîneur" : le combat Kenza Chaal

Kenza Chaal rêvait de briller à Paris. Elle veut juste recouvrer sa santé désormais. SYLVIE CAMBON

Victime de plusieurs blessures, la Sérignanaise, qui rêvait des JO en France, ne pourra sans doute jamais remonter sur un vélo. Elle met en cause sa Fédération.

Kenza Chaal aimerait comprendre. Vice-championne de France de BMX freestyle à deux reprises, finaliste des Mondiaux en 2021, 7e des Championnats d’Europe la même année, la jeune Sérignanaise, 20 ans, membre du pôle France de Montpellier, se bat depuis 2023 contre son corps, meurtri, et sa fédération.

Elle a longtemps hésité avant de s’exprimer dans les médias. Mais après plusieurs opérations chirurgicales, le rêve d’une carrière sportive envolé et la perspective de finir un jour paraplégique, Kenza Chaal ne retient plus ses coups.

Pour comprendre sa situation, il faut remonter un peu le temps. Avec les premiers “runs”, en 2016, l’athlète héraultaise a très vite souffert du dos. Jusqu’à une IRM (imagerie par résonance magnétique), plusieurs années plus tard, Kenza Chaal imputera ces douleurs à l’apprentissage du sport de haut niveau. La perspective des Jeux Olympiques à Paris fait alors oublier les efforts, les petits bobos et les risques. "Les kinés étaient au courant mais à aucun moment on ne m’a prescrit un examen, c’était toujours psychologique selon eux", déplore-t-elle aujourd’hui.

La descente aux enfers débute en mai 2023, après une première intervention sur le ménisque d’un genou. "Je suis revenue pour le Fise de Montpellier. Malheureusement pour moi, ce retour coïncidait avec les tensions au sein du pole et de l’équipe de France."
Patrick Guimez, "qui a tout construit au presque dans le BMX freestyle", ne fait plus l’unanimité. Entre lui, les autres membres du staff et les acteurs majeurs de la discipline, le dialogue est rompu. Au soir de la finale des Championnats du monde à Glasgow, en août 2023, la rupture se confirme : Patrick Guimez est viré, d’un simple coup de fil dans sa chambre d’hôtel.

"J’ai beaucoup regretté son départ, ça se passait très bien avec lui." Mais là encore, Kenza Chaal ne se formalise pas. "Je me suis dit : ça arrive (qu’un coach se fasse virer)." Cet épisode, qu’elle vit par procuration – pourtant qualifiée pour Glasgow, elle préférera déclarer forfait en raison de l’ambiance délétère –, correspond aussi avec l’augmentation de la souffrance physique.

"Un matin, à Sérignan, je n’ai pas pu me lever du lit." Le diagnostic est sans appel : hernie discale avec compression du nerf sciatique. Après plusieurs hospitalisations, une opération minimaliste – "sans ouvrir le dos" – est décidée.

"J’aurai alors aimé un signe du pole, un coup de fil du nouvel entraîneur Florian Ferrasse. Mais mise à part la préparatrice mentale, personne ne m’appellera" La situation va se répéter au lendemain d’une nouvelle intervention chirurgicale, la première n’ayant pas atteint ses objectifs. "J’avais un pied carrément paralysé".

"Soit ça passait, soit ça cassait"

"Cette fois, on m’a ouverte complètement (octobre 2023)." Et, miracle, le résultat est significatif. "Tout allait mieux même si je n’étais pas sûre de pouvoir reprendre le vélo. C’est d’ailleurs ce que j’ai dit au nouveau médecin du pole quand il m’a suggéré d’aller faire une rééducation à Capbreton : “Il m’a dit, tu verras, tu reviendras nickel”. J’ai accepté. Hélas, ce n’était pas adapté. Et au bout de quelques jours, toutes les douleurs sont réapparues (janvier 2024), mon pied était à nouveau paralysé. La réaction du médecin ? “Soit ça passait, soit ça cassait”. Et toujours pas de nouvelles du coach. Avec mes parents, on a alors décidé de ne plus suivre ce protocole et de prendre l’avis d’un professeur à Marseille. Ce dernier m’a diagnostiqué le syndrome de la queue-de-cheval. Il ne veut pas m’opérer. Trop dangereux, je peux finir paraplégique. C’est à ce moment-là que j’en ai référé à Florian Rousseau, le directeur de la préparation olympique au sein de la Fédération."

"Pas légitime pour commenter les choix d’un chirurgien"

Croisé lors du Fise de Montpellier, l’ancien champion olympique acquiesce. "Pour la Fédération française de cyclisme, la priorité, c’est la santé des athlètes. Qu’elle soit physique ou mentale", a-t-il d’abord indiqué lors de notre entrevue.
Concernant le cas Kenza Chaal, Rousseau assure "qu’elle a été accompagnée comme il se doit par la Fédération et son staff médical. Sur l’aspect socio-professionnel aussi, avec plusieurs contacts réguliers".

Il réfute en revanche les accusations de la jeune femme quant à l’absence d’appels du staff en général et de Florian Ferrasse en particulier. "Elle a été en contact permanent avec le médecin de la Fédération, la responsable du suivi socio-professionnel, la préparatrice mentale. Et tout a été relayé auprès de l’entraîneur et de la DTN (Direction technique nationale). Florian l’a appelé plusieurs fois, je l’ai fait moi-même à deux reprises. Aujourd’hui, notre souhait, c’est qu’elle retrouve l’intégrité de sa santé."

Le patron des équipes de France de cyclisme refuse par ailleurs de s’expliquer sur les décisions médicales : "Je ne suis pas compétent ou expert pour juger. Je ne suis pas médecin ni légitime pour commenter les choix d’un chirurgien. Je ne vous dis pas comment faire votre métier."

Kenza Chaal devra faire avec. À 20 ans, il lui faut désormais penser à l’après BMX. Petite, elle rêvait de devenir gendarme."Mais à cause de mon dos, même ça, je ne suis plus sûre que ce soit possible."

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