Miracle ? Un an après la condamnation de son propriétaire, l’église de Montagnac reçoit enfin l’autorisation d’être rénovée
|Olivier Fury, dans son église qu’il a rénovée. Désormais légalement… Midi Libre – SYLVIE CAMBON
Le propriétaire d’un monastère du XIIIe siècle avait été condamné pour des travaux réalisés sans l’autorisation de la Drac. Il avait pourtant sauvé l’édifice de la ruine. L’affaire semble se régler.
Alléluia. Dans la nef du monastère des Augustins à Montagnac (Hérault) dont il est le propriétaire depuis 2009, Olivier Fury respire. "On voit enfin le bout du tunnel", souffle-t-il, à la fois rassuré et… amer. Dans sa boîte aux lettres, début juillet, il a trouvé le permis de construire pour la rénovation de l’église, travaux pour lesquels il avait été condamné il y a un an.
Une affaire kafkaïenne
L’affaire, kafkaïenne, avait ému nombre de défenseurs du patrimoine. Car lorsque l’Héraultais avait fait l’acquisition de l’édifice attenant à sa maison, il l’a trouvé… en ruines : un trou béant dans le toit, des traces d’infiltration sur les murs, des objets de culte cassés et quelque 40 m3 d’immondices entreposées çà et là. Sur ses deniers personnels, "plus de 350 000 € et pas un centime d’argent public" insiste-t-il, et avec beaucoup d’huile de coude, Olivier Fury, aidé par les bénévoles d’une association de défense du lieu très rapidement créée, a fait revivre ce lieu que plusieurs générations de Montagnacois ont jadis fréquenté. Une rénovation réussie. Un magnifique sol en béton ciré dans la nef amène jusqu’à l’autel réhabilité. En 2017, un courrier de Brigitte Macron saluait ce travail qui a aussi valu au propriétaire la médaille de la Ville.
Oui mais voilà, l’église construite au XIIIe siècle étant inscrite au titre des monuments historiques depuis 2009, toute rénovation d’ampleur réclame une autorisation de la Direction régionale des affaires culturelles (Drac). Laquelle avait alors saisi la justice, qui n’a pas entendu sa bonne foi et a condamné Olivier Fury, non seulement à une amende, mais à "remettre le lieu en état". "J’ai vraiment cru que tous ces efforts pour sauver un lieu de notre patrimoine allaient être réduits à néant", rembobine-t-il aujourd’hui. Avec, ses projets d’organiser des visites et même des animations (son et lumière, dégustation de vins, conférences…), puisque l’affaire empêchait la municipalité d’autoriser l’ouverture des lieux au public.
Des coups de marteau
Le propriétaire du monastère avait alors décidé de prendre au mot le tribunal de Béziers et, en novembre dernier, a commencé à démonter la mezzanine construite au-dessus de l’entrée et reproduisant, selon de vieux documents retrouvés dans des archives, l’église telle qu’elle était au XIXe siècle. La médiatisation de ces coups de marteau a résonné jusqu’à la Drac. En janvier, une réunion de la dernière chance était organisée en mairie de Montagnac. "Ce jour-là, on m’a fait comprendre que si je déposais une demande de permis de construire, le dossier serait examiné avec attention et pourrait trouver une nouvelle issue".
En effet, quelques mois plus tard, après la visite d’un nouveau technicien de la Drac, lequel a conseillé à Olivier Fury de s’aider d’un architecte pour rédiger sa demande, celui-ci a reçu le précieux sésame. "Sans travaux supplémentaires, le sol en béton ciré devient aujourd’hui légal alors qu’on me disait, jusque-là, qu’il n’était pas conforme. On avait d’ailleurs déposé quasiment le même dossier il y a deux ans", constate le Montagnacois, qui préfère ne pas commenter les décisions du précédent technicien de la Drac. "Désormais, je dors mieux", se contente-t-il de dire. D’autant qu’une autre bonne nouvelle devrait suivre : celle de l’autorisation, grâce au permis de construire rétroactif, d’accueillir du public. "La demande est en cours d’instruction". À suivre.
De nouveaux trésors ?
Pour l’instant, Olivier Fury envisage seulement des visites guidées sur rendez-vous et repousse à plus tard l’ambitieux programme d’animations jadis imaginé. "D’abord parce que toute cette affaire a considérablement affecté nos moyens et surtout parce que les rendez-vous judiciaires ne sont pas encore soldés". L’appel de la décision du tribunal correctionnel de Béziers doit en effet être examiné par la cour d’appel de Montpellier en septembre. "J’ose croire tout de même que grâce à ce permis de construire, la justice n’aura plus rien à nous reprocher".
En attendant, il s’attelle à débusquer les secrets du monastère, notamment une autre chapelle qui pourrait se trouver dix mètres sous l’église. En toute légalité désormais.
Je m’abonne pour lire la suite