“Aiguiller les vers les métiers de demain” : le défi de Lise Bachmann, marraine du Fil Rouge

Marraine du Fil Rouge, Lise Bachmann est cofondatrice de Womaccelerator, une start-up innovante de la HR Tech, et fait partie du Top 100 des personnalités françaises du numérique.

On le sait, il y a trop peu de femmes dans la tech. Or 70 % des métiers de demain seront liés aux nouvelles technologies. Comment expliquer ce déficit de femmes ?

D’abord il faut préciser qu’il reste un problème de parité entre les femmes et les hommes dans le management des entreprises en France ainsi qu’en politique : il y a 37 % de femmes à l’Assemblée nationale versus 39 % lors de la précédente législature. Dans la tech, c’est encore pire.

Seulement 28 % des ingénieurs sont des femmes et seuls 12 % des ingénieurs en informatique sont des femmes. Vous vous rendez compte ? C’est un problème sociétal lié à des biais cognitifs. Les parents, les enseignants, les proches peinent encore à associer les filles aux mathématiques et à les aiguiller vers ces études et ces carrières alors qu’elles sont évidemment parfaitement capables d’acquérir les compétences requises pour exercer ces métiers d’avenir.

Quels problèmes ce manque de parité dans le numérique pose-t-il ?

Si les datas ne sont moulinées que par des hommes, on va créer une drôle de société… On risque de transformer l’IA en “BA”, en bêtise artificielle, et de prolonger voire d’intensifier les biais cognitifs. Au risque, in fine, de susciter la défiance des utilisateurs. C’est donc dans l’intérêt des entreprises de la tech et de l’intelligence artificielle d’associer les femmes pour créer les produits et les solutions dont la société dans son ensemble aura besoin demain.

C’est d’ailleurs prouvé : la parité hommes-femmes est bénéfique sur le plan économique pour les entreprises qui l’instaurent.

Absolument ! Outre la justice sociale, elle amène plus d’efficacité au sein des équipes, de performance financière, d’innovation, de responsabilité environnementale et sociétale dans l’entreprise, et de vision à long terme aussi. Les pays où les citoyens sont les plus heureux sont ceux qui respectent les droits des femmes et l’égalité des chances de réussite pour tous. Le monde ira bien mieux quand il y aura la parité réelle dans les instances dirigeantes des entreprises, associatives, politiques.

Parlez-nous de Womaccelerator, de quoi s’agit-il ?

C’est un programme de formation innovant que j’ai conçu et développé afin d’aider les entreprises à révéler tous leurs potentiels et de permettre aux cadres, et notamment aux femmes, d’accélérer significativement leur carrière pour atteindre des postes de plus grande responsabilité.

On aide aussi les entreprises à atteindre les objectifs fixés par la loi Rixain : 40 % de femmes cadres dirigeantes dans les entreprises de plus de 1 000 salariés d’ici 2030, sous peine de pénalités financières (jusqu’à 1 % de la masse salariale, ça n’est pas rien !). Les entreprises qui ont compris l’enjeu de la parité grâce à Womaccelerator accélèrent la transformation de leur management vers plus de diversité, d’inclusion et de performance.

Vous pensez qu’en France, on peut atteindre ces objectifs ambitieux ?

Nous sommes vigilants mais confiants. Je pense que la nécessité d’attirer des talents et de réussir le pari de la lutte contre le réchauffement climatique va accélérer l’arrivée des femmes dans le management et les Codir. Mon rêve, c’est qu’il y ait la parité hommes-femmes dans les instances dirigeantes des entreprises en 2035 et dans les métiers de la tech dans les années 2050. On ne lâchera pas la garde !

Lors du Gala du fil rouge, vous avez animé un atelier baptisé “Booster sa confiance en soi”. Quels “tips” pouvez-vous nous donner pour y arriver ?

La confiance en soi est une des clés de la réussite. Or on observe une grande autocensure chez les femmes. Mais ce n’est pas irrémédiable. Fermez les yeux, pensez à un moment de votre vie professionnelle où vous vous êtes dépassée, où vous avez atteint un objectif particulièrement ambitieux, où vous vous êtes sentie fière et puissante.

À chaque fois que vous aurez un moment de doute, repensez à cet instant. Je donne souvent les conseils suivants : ne restez jamais seule, allez chercher des conseils et surtout des feedbacks auprès de vos collègues, chefs, coach, proches : vous serez surprises du résultat ; créez-vous un réseau de personnes bienveillantes susceptibles de vous adresser des critiques constructives. Quant aux critiques cassantes, oubliez-les aussitôt.